Coups de savatte et feuilles de thé.
Nous avions quitté Wong Kar-Wai il y a cinq ans, en plein road-trip au coeur d'une Amérique mélancolique et solitaire. Le monsieur revient au pays et s'attaque carrément à l'histoire du kung-fu au vingtième siècle par le biais du portrait de ses plus illustres représentants, à commencer par le légendaire Ip Man.
C'est peu dire que le cinéaste avait toutes les cartes en main pour accoucher d'une immense fresque romanesque, aussi brutale que romantique. Les moyens, les talents et le contexte historique sont bien là mais il manque pourtant deux choses très simples: l'émotion et un scénario.
Se bornant à enchaîner les faits à la façon d'une fiche Wikipédia, le script peine à nous impliquer, à nous émouvoir pour le sort de personnages distants et vides, réduits à de simples marionnettes condamnées à exécuter des enchaînements au gré de séquences dont le simple but semble être de tout péter dans le décor. Wong Kar-Wai ne nous apprend pas grand chose et nous laisse ainsi sombrer dans un ennui poli, n'essayant même plus de raconter quoique ce soit dans sa seconde partie.
Même son de cloche en ce qui concerne le coeur du film, à savoir ses scènes de combats chorégraphiées par Yuen Woo-Ping. Rien de neuf à l'horizon et le cinéaste semble calquer les films de Zhang Yimou avec ses combattants délicats se foutant sur la tronche avec le petit doigt en l'air. En gros, tout ce que je déteste dans le genre, là où j'aurais souhaiter voir de la glotte arrachée avec les doigts, de la tête fracassée contre le mur ou du nunchaku à travers la gueule.
Dieu merci, Wong Kar-Wai soigne son cadre (même si ses ralentis saccadés deviennent franchement barbants), offrant de superbes images mettant en valeur un casting glamour à défaut d'être transcendant et livre un joli livre d'images totalement creux, agréable à feuilleter mais loin du monument que l'on pouvait espérer.