Joli succès des vidéoclubs dans les années 1980, Philadelphia security est devenu un film totalement confidentiel que Jean-Baptiste Thoret vient d’exhumer dans sa collection « Make my Day ». Une excellente idée que de réhabiliter ce film qui reprend les codes des « vigilante » de l’époque mais qui apporte de belles variations. À l’origine du film, le producteur Dino de Laurentiis, qui détenait les droits d’un Justicier dans la ville, les avait revendus à la Cannon car il ne croyait pas possible de rentabiliser la franchise avec des suites. Se rendant rapidement compte de son erreur, il mit alors sur pied ce film dans le but de concurrencer Un Justicier dans la ville 2. Là où le film de Michaël Winner s’apparente à un pur film d’exploitation (contrairement au premier épisode qui est un plutôt un drame, cette suite est un film de vengeance qui tire dans tous les sens), celui de Lewis Teague fait davantage dans la dentelle. Le prétexte est, certes, toujours le même mais l’exécution prend un tour différent. Un épicier, exaspéré par l’insécurité de son quartier, décide de er à l’action quand sa femme puis sa mère sont agressées. Plutôt que de quitter ce lieu où sa famille a toujours vécu, il met sur place une sorte de milice appelée à protéger les habitants du quartier.
À l’image des classiques du genre, la violence est bien présente. On n’hésite pas à s’en prendre à de petites vieilles ou à des gosses, on coupe des doigts, on tire dans le tas, enfin une somme d’actions détestables qui motivent une réaction. Cette réaction n’est pas l’œuvre d’un seul homme (même s’il y a un meneur) mais d’un petit groupe de prolétaires exaspérés de voir leur territoire devenir un véritable coupe-gorge. Ce groupe de voisins bienveillants ne se limite pas à faire de la prévention. Il rentre aussi dans le tas, à l’image de son leader qui semble, plus le film avance, sombrer lui-même dans une violence qui le grise. Dans le rôle de ce personnage, Tom Skerritt fait merveille, oscillant entre simple type désireux de permettre à sa famille de vivre en toute quiétude, personnage obsédé à l’idée de nettoyer son quartier puis hésitant à s’engager en politique ou à se laisser aller à sa soif justicière qui l’envahit d’une péripétie à l’autre. Le mérite du film est de sortir du schéma caricatural du gentil vengeur. Entre ombre et lumière, le personnage de Tom Skerritt incarne à la perfection la complexité que représente le sujet de l’autojustice.
Peinture du petit peuple italo-américain puis intéressant pont avec la politique, le film reste une série B mais qui va un peu plus loin que ses concurrentes pour interroger un phénomène qui n’est pas que cinématographique puisque le personnage principal est inspiré d’une histoire vraie. Le résultat parvient à maintenir l’équilibre entre l’action et la réflexion, et se révèle plutôt une très bonne surprise. Témoignage social et politique, cette série B maligne mérite d'être découverte ou redécouverte.