On n’entre pas dans Warfare comme dans un récit : on y tombe, parachuté, sans lumière, avec pour seul guide un groupe de soldats.
Ici, ce n’est pas la guerre comme théâtre héroïque, mais la guerre comme état mental. Quelque chose de désorientant, de diffus, d’accablant. Alors on attend. On attend encore. Et quand l'action survient, elle n’est ni spectaculaire ni tragique.
Le film s’organise autour d’un vide. Vide narratif. Vide idéologique. Vide émotionnel aussi. Non pas par faiblesse, mais par choix.
La guerre n’est plus ici une histoire à raconter, mais une langue à décrypter. L’argot militaire, les ordres hachés : tout dans ce phrasé dessine une grammaire codée, dont la fonction n’est pas tant de dire, que de survivre.
Garland, déjà dans Men ou Civil War, triturait les formes classiques du récit, mais ici, avec Mendoza, il semble avoir décidé de renoncer à toute dramaturgie. Ce qui reste, ce sont des gestes. Et puis cette virilité, ces corps jeunes, nerveux, bardés d’équipement, qui vacillent à la moindre secousse.
Le temps, dans Warfare, n’avance pas, il s’étire. Le film devient une machine à désorienter. À forcer le spectateur à ressentir cette latence qui est le vrai rythme de la guerre. Pas d’exploit, pas de crescendo, juste l’usure, le doute, l’effroi contenu.
Et c’est là que Warfare frappe : dans son refus de catharsis, dans son obstination à ne pas conclure. On agit, on obéit, on survit et c’est tout.
Mais peut-être est-ce là aussi sa limite. Car à force de vouloir capter la guerre, Warfare se referme sur son propre formalisme. On ire le geste, on respecte la tentative, mais reste au fond du regard une distance, un froid.