Rouge, impairs et manques

Quand le projet est lancé par les producteurs, l’idée est simple : faire de Franco Gasparri, lui qui est une star des magazines de roman-photo, une vedette du grand écran. Déjà aperçu dans un mélo où on espérait la gente féminine se ruer dans les salles, le bellâtre italien est également ciblé pour attirer un public masculin avec ce polar réalisé par Stevio Massi qui vient de signer un beau succès avec Brigade volante. Dardano Sacchetti est de nouveau à l’écriture du scénario mais, avouons-le, le résultat est bien moins convaincant. Si l’acteur principal n’est pas en cause, le scénario se révèle moins abouti et l’ensemble plus planplan. Un commissaire qui, comme toujours, agit selon ses propres méthodes, s’échine à faire tomber un homme d’affaires véreux qui trempe dans des affaires de drogue qui polluent la ville de Milan. Le film s’inscrit très clairement dans le sillage d’un French connection où un flic fait de son arrestation une véritable obsession mais, bien sûr, sans la puissance du film de William Friedkin. La faute à un scénario quelque peu paresseux et un ton globalement trop caricatural.


L’ensemble se suit cependant sans déplaisir. Stevio Massi livre une réalisation maîtrisée avec des séquences toujours lisibles, servant avec rigueur un récit certes conventionnel mais efficace. Mené sur une partition toujours réjouissante signée Stelvio Cipriani, l’ensemble est surtout porté par une distribution particulièrement solide avec des seconds rôles habitués du genre, à l’image de l’excellent Giampiero Albertini ou de Lee J. Cobb venu finir sa carrière en Italie. En tête d’affiche, s’il n’a pas le charisme de Tomas Milian ou la présence de Maurizio Merli, Franco Gasparri s’en sort très bien dans un rôle qui manque, malgré tout, de nuances. Le résultat aurait certainement mérité d’être un poil plus nerveux, avec une enquête plus fouillée et quelques scènes d’action supplémentaires. Au lieu de cela, il faut attendre le dernier quart d’heure pour avoir droit à quelques règlements de compte au pistolet et une course-poursuite en voitures qui n’a pas révolutionné le genre, loin de là.


La formule manque donc d’audace pour totalement convaincre. Stevio Massi, on le sent, ne veut pas livrer un film brut de décoffrage, mais le manque de matière pour en faire un récit plus abouti plonge le résultat dans un certain déséquilibre. Incapable de faire ressortir une véritable dramaturgie des différents assassinats qui émaillent l’ensemble, le tout manque clairement d’énergie, mais surtout de générosité. La pauvreté de certains dialogues finit par envoyer cette production dans le tout-venant du genre, ce qui n’aurait pas dû être le cas au regard des nombreux atouts dont il disposait sur le papier. Le film fut cependant un grand succès lors de sa sortie en Italie et, quatre mois seulement plus tard, sortit en salles sa suite.


5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Dites polar à l'italienne

Créée

il y a 5 jours

Critique lue 13 fois

4 j'aime

Play-It-Again-Seb

Écrit par

Critique lue 13 fois

4

Du même critique

La philosophie sur le comptoir

Aïe, aïe, aïe... L'arrivée de Fabrice Caro en lieu et place de Jean-Yves Ferri qui venait, à mon sens, de signer son meilleur Astérix dans le texte, était pourtant annoncée comme une bonne nouvelle...

le 15 nov. 2023

24 j'aime

22

Bottes de cuir sans chapeau melon

Le sujet de la proie aveugle n’est pas entièrement nouveau puisqu’il a déjà été traité dans, notamment, Seule dans la nuit quelques années plus tôt. Le parti-pris de ce film écrit par Brian Clemens...

le 18 nov. 2022

23 j'aime

4