C’est désormais confirmé, l’émotion au cinéma est avant tout une affaire de famille, inscrite dans les gênes du clan Coppola.
Le « sentiment », parfois guimauve transpirait déjà du cinéma de Grandpa, (Francis), en filigrane, caché parfois dans une utopie méconnue « La Vallée du bonheur » ou plus ostensiblement dans ses compositions plus tardives ; mais c’est évidement dans la filmographie de Sophia que se noue l’intime, la tendresse qui entoure l’approche de personnages balbutiants, adolescentes ou jeunes femmes attachantes. Si les tourments de l’adolescence ont dans un premier temps imprimé l’œuvre de Gia, nièce de Sophia et donc petite fille de Francis, à l’occasion de son premier film « Palo Alto », « The last Showgirl » sonde à l’inverse le quotidien d’une danseuse de revue vieillissante dans un cabaret de Vegas, dont la nouvelle direction artistique envisage de rajeunir le spectacle et la troupe.
Certes, le propos est moins fougueux que dans les récits « adolescents », le ton plus mélancolique presque élégiaque, mais la réalisatrice ébauche ses thématiques avec une distance affectueuse envers sa showgirl et sa comédienne, (ancienne sirène enfin devenue actrice Pamela Anderson) que l’on découvre capable d’émouvoir, de composer un personnage fragile, perdue dans un milieu où la vieillesse est un naufrage. Sans fard, sans maquillage désormais, l’ancienne sexy girl des années 90, se présente et c’est paradoxal en véritable révélation, dans un récit qui interroge avec une belle acuité, l’après carrière de ces artistes confrontées à l’adversité inexorable de la jeunesse, à une société du spectacle qui n’accepte plus de montrer les corps déclinants.
La « show-woman », cadrée le plus souvent en gros plan surprend par sa capacité à illustrer l’introspection d’une femme à la croisée des chemins, d’abord lancée à corps perdu dans un refus frénétique, se soumettant de nouveau au jeu des auditions, et s’exposant aux refus dégradants, telle un insecte ivre happée par la lumière des projecteurs ; puis cessant sa quête de l’impossible, Shelley se retrouve seule face à elle-même, démunie face à un é qu’il faut bien affronter lorsque sa fille se présente et la confronte à la culpabilité d’une mère qui a négligé sa progéniture.
Cependant au-delà de ce portait sensible, « The Last Showgirl » échoue un peu dans sa volonté d’esquisser un tableau plus global de caractères féminins : les personnages secondaires sont parfois caricaturaux : Jamie Lee Curtis en amie compatissante en fait des tonnes, Kiernan Shipka en jeune danseuse fragile, rappel inutile des relations conflictuelles que Shelley entretient avec sa fille, embrouillent un fil narratif que l’on aurait souhaité plus resserré autour des relations familiales ou de la liaison naissante de la belle avec Eddie. La difficulté du métrage à s’émanciper de son cadre étroit transparait dans une mise en scène sans réelle ampleur, (l’utilisation du format 8 millimètres pour des raisons probablement budgétaire n’est évidemment pas étranger à ce ressenti), et frustre d’autant plus que les prémices de la fable désenchantée avaient fait naitre quelques attentes, comblées en partie seulement, par la sincérité qui se dégage du récit et surtout par le talent d’une actrice…