Accompagné d'une bande annonce grandiloquente, encensé avant même sa sortie par une presse quasi unanime, "The brutalist" se présente d'emblée comme l'œuvre d’un cinéaste malin, notamment par son titre, qui semble jouer sur une ambivalence des mots, puisque l'on devine aisément que le terme ne se limitera pas à suggérer un courant architectural mais qu'il impactera le propos d'une brutalité probablement inattendue.
Le début du métrage se vit donc comme un long prélude, puisque le film de Corbett est également une histoire de temps et un hommage aux épopées d'antan, de par sa longueur (plus de trois heures trente) et son découpage empreint de maniérisme (ouverture , première partie, entracte marqué à l'écran, deuxième partie et épilogue). Le propos architectural du titre est rapidement relégué à l'arrière plan, le courant Brutalist en tant que tel n'est jamais mis en avant, si ce n'est plus tard par quelques images des constructions de László Tóth, qui viennent souligner l'opposition entre le caractère doux de l'architecte hongrois et ses réalisations brutes, lorsqu'il est confronté à des hommes au comportement bien plus "viril", son cousin qui l'accueille aux Etats-Unis dans un premier temps, puis à Van Buren, richissime entrepreneur à la morale sommaire, et aux manières expéditives très proche (et ce n'est évidemment pas un hasard) de l'image Trumpienne (Trumpiste ?,).
L'homme s'il prend l'architecte sous son aile et permet de donner un bel élan à sa carrière et à sa notoriété, se montre constamment paternaliste, condescendant voire humiliant, renvoyant son protégé à sa condition d'immigré juif redevable dès que l'occasion se présente ; tandis que le cinéaste n'a de cesse de renvoyer son spectateur à sa condition d'ignorant, réduit à se contenter des belles images qui défilent devant ses yeux, mais guettant un renversement ou même un changement radical dans le propos qui se révèle de plus en plus improbable à mesure que le récit s'étire et traine un peu.
Finalement, "The Brutalist" serait à tout prendre un film honnête, construit bien loin de la rigueur anguleuse des édifices brutalistes, hésitant entre le portrait intime d'un homme à la destinée contrariée et des réflexions plus profondes sur l'antisémitisme, le pouvoir de l'argent, et c'est au fond (pense-t-on encore), probablement dans une attente vaine que résidera l'inattendu, le twist deviné n'étant qu'une illusion de spectateur en mal de fantasme.
C'est à ce moment, très près du terme, que le métrage amorce un virage brutal et ridicule (?) délivre, LA fameuse révélation que l'on n'attendait plus, mais qui soudainement éclaire l'ensemble d'une lumière différente et oblige à reconsidérer les trois premières heures sous un angle tout à fait différent, sans qu'aucun élément préalable n'ait été délivré par un réalisateur tout puissant. Un Deus Ex-Machina en forme de bras d'honneur au cinéma et à son auditoire qui désormais sait bien qui est le brutalisant de l'histoire.