🔴Pour le lecteur pressé, en moins de 3 minutes : https://youtu.be/2ED1cHNbEHs
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C'est un vacarme. Une cuisine enragée, où l’acier cogne, les voix crient, les corps s’usent. The Grill (La Cocina) d’Alonso Ruizpalacios, c’est l’Amérique vue depuis la trappe à détritus d’un fast-food de Manhattan.
Ici, tout suinte la tension : les murs, les gestes, les regards. Et le film veut qu’on suffoque avec eux, caméra collée aux pores, bande-son percussive, rythme cardio. C’est parfois brillant, parfois pompier. Un plan-séquence, c’est bien, mais quand il devient gimmick, on décroche. Il y a dans cette mise en scène quelque chose de frénétique, presque hystérique, comme si le film avait peur qu’on s’ennuie.
Mais ce n’est pas l’ennui qui guette, c’est la distance. Ruizpalacios sait créer la forme — il l’aime trop, peut-être. Ce chaos visuel finit par écraser ce qu’il prétend montrer : la condition des travailleurs invisibles, l’exploitation qui use et jette. On entrevoit des destins, mais rien ne s’ancre vraiment. On sort frustré, à moitié rassasié. Comme après un burger tiède.
Rooney Mara, elle, joue le rôle du témoin, la spectatrice perdue dans le tumulte, et si son personnage semble flotter à côté de l’intrigue, c’est peut-être voulu. Son regard dit plus que ses répliques. Face à elle, Raúl Briones incarne la colère contenue, le type à bout de nerfs, qui pourrait exploser ou s’effondrer à tout instant. Dommage que le film ne lui laisse pas plus d’espace pour qu’il respire.
Il y a des fulgurances, oui. Des idées. Un vrai propos. Mais noyé dans le bruit. Le film veut dénoncer, secouer, faire transpirer. Il y parvient parfois. Et puis ça retombe, comme une pâte trop travaillée. On aurait voulu une tragédie poignante, on a un ballet désarticulé.
Alors, 6/10. Parce que l’effort est là, parce que ça bouscule. Mais parce qu’on ne peut pas juste crier pour se faire entendre. Parfois, il faut aussi écouter.