Jean Rochefort était un géant. Le verbe de Molière avec l'élégance du gentleman farmer, un humour pince-sans-rire qui m'aura souvent fait écrouler de rire, mais qui aussi dans le registre dramatique aura su m'émouvoir. Une personnalité aussi ionnante que profondément attachante.
Tandem est certainement l'occasion de le voir dans un de ses plus beaux rôles, et aussi bien ici dans la drôlerie que dans l'émotion. Il n'y a que lui qui peut parvenir à donner autant de vérité à ce rôle de has-been, animateur de radio cabotin, présentateur d'une même émission depuis 25 ans, qui va de long en large dans les bleds les plus paumés et sinistres de , dans les chambres d'hôtel ternes des plus ternes hôtels de Province, voyant les mêmes genres de tronches, les mêmes types de ploucs et d'abrutis, pas la moindre activité nocturne. Une vie désespérément plate et répétitive, mais c'est son seul véritable carburant, sa seule véritable raison de vivre. Et il va être viré comme une merde du jour au lendemain... Un personnage dont le caractère fantasque cache de profondes fêlures. Un rôle en or que l'acteur transforme en platine.
Un rôle en or, parce qu'il faut reconnaître que le scénario a réussi à croquer des personnages profondément justes. La mise en scène de Patrice Leconte est dans tous ses films discrète, sans la moindre audace. Cela a souvent desservi leur qualité, mais ici, face à la force des personnages, à une interprétation brillante, c'était le meilleur parti à prendre. Ça se suffit largement.
Il serait injuste aussi de ne pas souligner une des meilleurs, si ce n'est le meilleur, rôles de Gérard Jugnot, en technicien fidèle et plus que cela..., qui apporte lui aussi beaucoup de vérité et d'émotion à l'ensemble en étant un partenaire pleinement à la hauteur de géant Jean Rochefort.
Et dernière chose, la chanson Il mio rifugio interprétée par Richard Cocciante colle parfaitement à l'ensemble.
En conclusion, aucune bonne raison de ne pas suivre ces deux solitudes sur les routes aussi sinistres soient-elles...