SILVIO ET LES AUTRES (16,5) (Paolo Sorrentino, ITA, 2018, 144min) :
Une flamboyante fresque bouffonne et triviale, un édifiant portrait du mégalomane "il cavaliere" Berlusconi, et un requiem sur l'Italie s'effondrant dans le vide de sens, cet opéra tragicomique déploie une richesse thématique et formelle à la démesure du sujet ! Pour illustrer ce voyage en Berlusconiland, le maestro Paolo Sorrentino nous régale encore avec une épatante mise en scène grandiloquente, où se mélange les effets clipesques, les virevoltants plans séquences et les séquences hallucinantes tour à tour libidineuses, baroques, cheaps où touchées par une grâce démente. Malheureusement en nous ne pouvons irer cette peinture berlusconienne qu'à travers une version tronquée (en Italie le film en deux volets dure 3h24m), et cela se ressent à travers un récit bancal en deux parties distinctes où il manque certaines respirations et approfondissements. Néanmoins cette envoûtante narration maline nous dépeint brillamment par le biais de situations fractales le grotesque pathétique du personnage (même s'il est relativement épargné par les nombreuses affaires mafieuses dans ce récit), tout en nous faisant découvrir également la mélancolie cachée sous le masque du clown. Une œuvre politique troublante et cruellement lucide qui bénéficie d'une bande musicale ébouriffante et de la remarquable incarnation du formidable Toni Servillo, l'acteur s'en donnant véritablement à cœur joie pour dévoiler un être bling bling et si singulier. Venez vous plonger dans l'intime laideur morale clinquante de Berlusconi personnifiant tous les maux italiens, à travers le mal aimable et fascinant Silvio et les autres. Esthétique. Sulfureux. Ambigu. Fulgurant.