C’est la confiance que j’accorde au label du Festival de Cannes qui m’a poussé à aller voir Partir un jour, un film qui, sur le papier, ne semblait pas me concerner. Je ne suis pas Français "de souche", mais je vis et travaille en depuis très longtemps. Je n’ai pas le background de la culture populaire et musicale française, ni avec l’imaginaire attaché aux chansons qui jalonnent le film. La campagne française, elle aussi, m’est encore étrangère dans bien des aspects. Bref, ce film ne m’était pas destiné.
Mais je crois au pouvoir du cinéma, à sa capacité d’émouvoir au-delà des frontières culturelles. Et le label cannois m’a déjà permis de découvrir des récits dont j’ignorais tout, mais qui ont su me toucher. J’y suis donc allé, curieux et ouvert.
Dès les premières scènes, je retrouve deux piliers bien connus de la culture française : la cuisine et l’adultère. Rien de surprenant. L’intrigue met en scène une cheffe enceinte qui souhaite raviver une ancienne flamme avec un amoureux de jeunesse, bien que chacun soit aujourd’hui engagé ailleurs.
Une chose m’a particulièrement dérangé, plus que l'adultère : le conflit central entre la protagoniste et son père repose sur une opposition entre cuisine populaire et gastronomie étoilée. Honnêtement, cette dichotomie n’a pas grand sens. Ces deux formes de cuisine ne visent pas les mêmes publics, ne relèvent pas des mêmes économies, et ne répondent pas aux mêmes attentes. Et ils sont tous deux cuisiniers professionnels et doivent avoir compris ceci. En faire le cœur d’un différend familial dramatique, c’est un raccourci un peu simpliste — voire dommageable — qui affaiblit la crédibilité du récit.
Je n’ai pas réussi à m’attacher au personnage principal. Elle semble en colère contre le monde entier — son père, son compagnon, son entourage — et rejette systématiquement la faute sur les autres. Elle ponctue ses phrases par un "putain", sans doute pour donner une impression de colère ou d’authenticité. Mais chez moi, cela produit l’effet inverse : cela m’a coupé de toute émotion.
Le thème du retour au pays d’un transfuge social est devenu récurrent dans le cinéma français ces dernières années. Mais ici, le film ne s’attarde pas sur l’évolution de la mentalité rurale : la campagne est figée, réduite à un décor nostalgique, terrain vague d’une histoire d’amour inachevée. Ceux qui y sont restés n’apparaissent que comme des spectres du é, presque comme des perdants. C’est une vision assez cruelle, mais peut-etre réelle de la campagne française ?
En résumé, le film est très ambitieux, en voulant etre à la fois Michelin et routiers en essayant de cocher toutes les cases.