Entre mer et port, le cinéma de Pagnol prend vie
Marius est un film fondateur du cinéma parlant français, porté par les dialogues savoureux et musicaux de Marcel Pagnol, mais dont la mise en scène accuse le poids de ses origines théâtrales. La force du film réside avant tout dans l’écriture : Pagnol excelle à faire vibrer la langue populaire marseillaise, entre gouaille et tendresse, avec une justesse de ton qui capte un monde disparu — celui du vieux port, des petits métiers, des désirs contrariés.
Les interprètes, au premier rang desquels Raimu (César) et Pierre Fresnay (Marius), donnent vie à des personnages devenus archétypes du cinéma français, avec une vérité et une chaleur humaine indéniables. Orane Demazis, en Fanny, incarne une jeunesse écartelée entre amour et devoir avec une fraîcheur parfois naïve, mais touchante.
Cependant, le film pâtit d’un statisme évident : les choix de réalisation d’Alexander Korda restent très figés, confinés aux intérieurs, avec une caméra peu mobile et une direction d’acteurs qui confond souvent naturalisme et déclamation. L’adaptation cinématographique peine à s’émanciper de la scène, et la photographie, bien que correcte, manque d’invention.
En somme, Marius est une œuvre précieuse pour son apport à la culture populaire française et pour sa valeur patrimoniale, mais son intérêt cinématographique pur reste limité. C’est davantage un grand texte filmé qu’un grand film tout court.