LA FEMME ET LE PANTIN (Jacques de Baroncelli, FRA, 1929, 115min) :
La Femme et le pantin transpose avec fidélité le roman éponyme de Pierre Louÿs publié en 1898, qui a connu de nombreuses adaptations peu convaincantes à travers l’histoire du cinéma. Grâce à la restauration en 4K de la Fondation Jérôme-Seydoux Pathé, l’œuvre de Jacques de Baroncelli offre un tourbillon des sens pas ordinaire. En effet, ce récit d’il y a un presque un siècle inspiré du tableau El Pelele (1791-1792) de Francisco de Goya qui représente quatre jeunes espagnoles en tenue traditionnelle faisant sauter un homme comme un pantin à l’aide d’un drap, s’avère résolument moderne sous la caméra inspirée du cinéaste. L’auteur livre un portrait de femme libre, à travers une danseuse de flamenco (interprété par l’envoûtante Conchita Perez) qui s’amuse à ensorceler un homme riche (Raymond Destac) persuadé que le pouvoir de l’argent finira par faire succomber la promise. La narration est particulièrement bien rythmée, peu encombrée par une quantité de cartons de dialogues, grâce à un montage rapide, une judicieuse mise en scène brillante dans le choix de cadres qui capte le langage éloquents des corps avec une sensualité étonnante pour l’époque (notamment lors d’une mémorable séquence de danse où l’héroïne est entièrement nue). Une œuvre féroce formellement inventive au ton obstinément avant-gardiste, qui devrait pouvoir enfin retrouver grâce à sa sublime restauration tout son aura cinéphilique et sa résonnance inoubliable par rapport à certains enjeux sociétaux contemporains. Magnifique. Irrésistible. Fascinant.