Onze années après le remarquable Printemps Tardif, Yasujiro Ozu en propose une variance avec Fin D'automne, où ce n'est plus un père qui laisse planer le doute sur ses intentions pour pousser sa fille au mariage, mais une veuve.
C'est une variance un peu plus légère que propose Ozu, avec une oeuvre perdant un peu en émotion et dramaturgie, ce qu'elle va gagner en humour, ce qui la rend finalement assez intrigante alors que, évidemment, le cinéaste japonais ne tombe jamais dans le pastiche. Il démontre comme souvent (toujours même) un vrai savoir-faire pour faire de son oeuvre une chronique à la fois authentique, sobre et d'une incroyable justesse, dressant par ailleurs un ionnant constat social sur le Japon d'alors.
Si Fin d'automne est une oeuvre plus légère, elle parvient tout de même à dégager une certaine émotion, notamment par le biais du regard attendrissant d'Ozu. Il parvient à nous faire ressentir la force, qu'elle soit positive ou négative des liens entre la mère et les filles, l'impression de participer à cette vie est là et la vision tragi-comique sur cette société en pleine mutation, devient un régal à suivre. L'une des forces du cinéma d'Ozu, en plus d'une habilité certaine à aborder des thématiques intergénérationnelles tout en dénonçant les anciennes traditions, se trouve dans sa façon de capter les personnages, ici il n'y en a pas vraiment de secondaires, ils sont tous importants, avec un rôle majeur à jouer ainsi qu'un attachement particulier qui va se créer entre le spectateur et chacun d'eux. On pourra aussi apprécier les trois quinquagénaires, séduisant la même femme et étant de remarquables vecteurs d'humour, alors que les comédiens sont toujours remarquables, à l'image des jeunes filles notamment.
Toujours avec une caméra à ras du sol ainsi qu'une mise en scène minimaliste, bien souvent en intérieur, Ozu soigne ses plans, joue magnifiquement avec les couleurs et parvient à capter les sensations des personnages par de simples images, regards et gestes. Il y a une impression de naturel dans les décors que l'on retrouve dans son cinéma, tout sonne toujours vrai, et la beauté formelle est en osmose avec celle de cette histoire, qui d'ailleurs bénéficie toujours d'une incroyable justesse d'écriture, à l'image des dialogues où l'on trouve juste ce qu'il faut, pas un mot de trop ou un manquant.
Yasujirô Ozu propose avec Fin d'Automne une légère et touchante variance de Printemps Tardif, sachant créer une ambiance forte, sublimée par une jolie et sobre mise en scène, ainsi que d'une justesse incroyable, tant dans les personnages, enjeux que dans la beauté formelle de l'oeuvre.