Dans Les Abeilles grises, Andreï Kourkov nous prouve que la guerre n’empêche pas le miel de couler… même s’il a un goût de poussière et de mélancolie. On suit Sergueï, un apiculteur perdu quelque part entre les ruines du Donbass et son infinie quête de paix (ou au moins d’un coin tranquille pour ses abeilles, ce qui est déjà un défi en soi).
Là où d’autres feraient un roman explosif, Kourkov préfère le doux bourdonnement d’une écriture feutrée et tranchante. Il nous balade dans une Ukraine en lambeaux, où les snipers sont plus nombreux que les voisins et où trouver un coin sans bombardements tient du miracle. Sergueï, lui, préfère parler à ses abeilles qu’aux humains, et on ne peut pas lui en vouloir : elles sont bien plus fiables et bossent sans râler.
C’est drôle et triste à la fois, absurde et hyperréaliste, une sorte de road-trip existentiel où les seuls vrais survivants sont les butineuses. Et au final, on referme le livre en se demandant si les abeilles ne sont pas les seules à vraiment comprendre ce monde en perdition.