Dans ce court pamphlet, Paul Lafargue, socialiste et gendre de Marx, s’en prend à une idole sacro-sainte du monde contemporain : le TRAVAIL.
Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traine à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est amour du travail, la ion moribonde du travail, poussée jusqu’à |’épuisement des forces vitales de l’individu et de sa progéniture.
Ecrit en 1880, Lafargue dénonce les conditions de travail inhumaines que subissent les classes ouvrières, s’abîmant pendant une dizaine d’heures par jour à l’usine, parfois depuis la tendre enfance. Il développe une vision de l’Homme construite autour de la nécessité de l’épanouissement physique et intellectuelle, qui e notamment par le repos et l’oisiveté (autant d’activités que ne connaissaient pas les prolétaires de son époque).
Dans la société capitaliste, le travail est la cause de toute dégénérescence intellectuelle, de toute déformation organique.
Il prend comme idéal d’existence le quotidien des citoyens de l’Athènes antique, mode de vie qui selon lui pourrait être atteignable par tous, à l’heure où les esclaves du é pourraient être remplacés par les machines de la modernité. Il rappelle que tous les grands philosophes prêchaient la paresse, que Jésus critiquait le travail et que Dieu lui-même avait choisi de se reposer le dimanche !
Bref, cet essai bouillonne d’idées novatrices (Lafargue fulmine la colonisation et anticipe déjà les travaux de Foucault), et surtout adopte un style acéré, véhément et vindicatif absolument jouissif.
Mais si la forme est parfaite, que l’intuition de départ me plaît beaucoup, l’argumentation est assez bancale. Plusieurs raccourcis dans le raisonnement qui dérangent, quelques simplifications économiques presque vulgaires, et surtout une analyse sociologique complètement à côté de la plaque : selon Lafargue, le premier responsable de ce règne du travail-torture, c’est l’ouvrier lui-même, ouvrier qui « adore » le travail et qui n’arrive pas à s’en er… Le ridicule de cette thèse se suffit à lui-même.
O Paresse, prends pitié de notre longue misère ! Ô Paresse, mère des arts et des nobles vertus, sois le baume des angoisses humaines !