Dans ma jeunesse, j'avais déjà lu "Le couteau sur la nuque" plusieurs fois avant de m'y replonger récemment, ce qui peut expliquer ma relative sévérité.
Car ce qui m'a frappé lors de cette relecture, c'est l'impression d'un joyeux bordel méchamment alambiqué, d'une histoire tarabiscotée au possible ; on a connu Agatha Christie plus limpide dans sa narration et dans la gestion de ses rebondissements.
Ici, il y a tellement de pistes et de fausses-pistes qu'on finit par s'y perdre et par ne plus forcément vérifier si chaque élément s'inscrit minutieusement au sein du puzzle général.
En même temps, je fais confiance à la Reine du Crime pour avoir imaginé une histoire réellement millimétrée, mais cette fois-ci aux dépens des critères de vraisemblance et surtout de fluidité.
Ainsi, "Le couteau sur la nuque" regorge de trouvailles indéniablement brillantes (la lettre dont il manque une page, la confusion sur Pâris/Paris,...) mais qui s'apparentent quelque peu à des effets de manche noyés dans la masse.
Ceci posé, on prend plaisir à retrouver le fameux trio magique, véritable pierre angulaire de l'œuvre christienne :
- Hercule Poirot, le célèbre détective belge
- le capitaine Hastings, narrateur et faire-valoir de Poirot
- enfin l'inspecteur Japp, caricature du flic anglais jovial mais borné
On évolue donc avec ces trois-là au cœur du Londres des années folles, des chambres du Savoy aux meilleures tables de Soho, au sein de la bonne société anglo-américaine, composée d'aristocrates, de mécènes et de comédiens divers.
C'est d'ailleurs l'occasion pour Agatha Christie, inspirée par le sujet, de jalonner le roman de saillies humoristiques du meilleur effet, n'hésitant pas à moquer cette élite sociale boursouflée et corrompue.