La Sentence par Christlbouquine

Tookie âgée d’une trentaine d’années, se retrouve bien malgré elle à transporter un cadavre pour rendre service à des amies. Mais ce cadavre s’avère être lesté de drogue ! Tookie écope donc d’une peine de prison assez lourde durant laquelle elle trouve un certain réconfort dans un dictionnaire que lui a fait parvenir l’une de ses anciennes professeures. Libérée une dizaine d’années plus tard, Tookie trouve du travail dans une petite librairie. Mais bientôt, l’esprit de Flora, une fidèle cliente décédée, vient hanter les rayons et errer parmi les livres. Tandis que la planète est confrontée à l’arrivée du Covid-19 et à ses conséquences tragiques et que l’Amérique de Trump s'embrase après le meurtre de George Floyd par un policier, Tookie s’interroge sur son identité, sur son appartenance et ses origines amérindiennes et sur son héritage familial.

Ce roman de 430 pages se lit avec grand plaisir et sans une seule minute d’ennui. Pourtant cela n’allait pas forcément de soi tant les sujets que Louise Erdrich aborde ici sont nombreux et denses. Mais elle s’en sort magnifiquement et sans jamais perdre son lecteur en intégrant des moments de grâce totale et à un certain humour qu’elle distille au fil des pages et qui allègent le récit.

C’est un récit enchanteur et enchanté que nous livre l’auteure malgré la violence sourde qui l’habite. L’auteure nous ouvre les portes de l’histoire, de la culture, des croyances amérindiennes dont elle est l’un des porte-parole emblématiques et nous apporte un éclairage sur un peuple qui a subi la brutalité de la colonisation à travers ce personnage de Tookie.

Elle nous parle aussi de la puissance des mots (le titre joue d’ailleurs sur deux significations en anglais : sentence en tant que condamnation et sentence qui veut dire “phrase”) avec la ion que Tookie entretient pour les livres.

On comprend, à travers l’ouvrage, les implications du é sur l’histoire contemporaine, les blessures qui se transmettent de génération en génération et qui laissent des traces indélébiles avec lesquelles il faut composer. A travers le prisme de ce qui est advenu, Louise Erdrich éclaire le présent et les événements plus récents survenus aux Etats-Unis. Elle démontre que le présent ne peut pas être compris et lu sans avoir appréhendé les traces laissées par le é. Riche et ionnant.