Prêts pour une triple mise en abime ?
Vous ouvrez le livre, c'est un roman d'Umberto Eco mais le livre est écrit du point de vue d'un éditeur qui aurait retrouvé des feuillets formant les "mémoires" d'un naufragé et en ferait une sorte de roman en complétant les trous. Or, ces feuillets consistent largement en un roman écrit/fantasmé par le naufragé. On a donc un roman écrit par le naufragé, personnage d'un roman écrit par l'éditeur, lui même personnage d'un roman écrit par Eco.
Il m'a fallu 6 ans pour lire ce bouquin: commencé en 2018, il me tombe des mains, repris en 2020 idem, rebelotte en 2023 et enfin en 2025 et cette fois je me suis forcé à aller au bout.
J'ai trouvé le livre époustouflant d'ennui. Première page : un naufragé sur un radeau de fortune parvient à se hisser sur un navire abandonné au mouillage entre deux iles du Pacifique. 40 chapitres plus loin, le naufragé est toujours seul sur son navire au mouillage, fin du livre. Après 10 chapitres à élaborer des techniques pour redre l'île à laquelle il fait face, 50 moments ou on se dit "ah, l'intrigue va progresser": non. Et l'île ? il ne l'atteindra jamais.
On a bien quelques ages sur sa vie d'avant mais l'écrasante majorité du bouquin sont des digressions sur la compréhension théologico-scientifique baroque de personnages du XVIIe siècle. Plus on s'approche de la fin, plus on supplie Eco de faire advenir quelque chose, n'importe quoi, au lieu de ça, il nous offre le chapitre "Dissertations en forme de paradoxes sur le mode de penser des pierres" dont le titre reflète avec précision le contenu.
Le livre aurait dû s'intituler "300p sur le problème des longitudes et des considérations théologiques et scientifiques des européens et des jésuites au XVIIe siècle"
Quelques points quand même pour les nombreuses références historiques qui font qu'on a tout de même l'impression de ressortir du livre avec quelque chose, et les subtils clins d'œil notamment à Cyrano et Pascal.