L’enragé est le récit d’une vie d’enfant dans une colonie pénitentiaire de belle île en mer en 1934. Conçu à partir d’une histoire vraie, le roman comble les manques de la réalité depuis la genèse de l’enfermement jusqu’à l’évasion d’un groupe d’enfants dont un seul ne sera pas repris. On suit l’évolution de cette cavale. Cette histoire est bouleversante pour ce qu’elle nous apprend de l’effacement pur et simple de la société, des enfants nomades, des sans famille, de ceux qui sont en trop, des orphelins. Ces enfants ne sont pas des délinquants, ce sont des petits voleurs de trois fois rien, d’un quignon de pain ou d’un œuf. Placés là sans jugement à la merci des matons qui vont les mettre en ménage dès leur arrivée, les battre et les punir au moindre écart. C’est à partir d’un morceau de fromage que tout s’enchaîne. Sorj Chalandon écrit un roman qui résonne dans sa vie. Nous sommes entre les deux guerres, le roman offre à son enragé des poings au bout des bras et des rencontres de gens biens. Ce n’est pas un catharsis, c’est un livre qui témoigne de blessures ouvertes. Le roman a cette capacité à faire partager des sentiments avec ses lecteurs. Une écriture fine, juste et prenante qui bouleverse et nous incite à tourner la page. A mon avis le style est intimement lié à l’histoire, ce qui fait de ce roman un très bon livre qui mériterait une version cinématographique. Bonne lecture