Thomas Bernhard (1931-1989) est un auteur majeur. Sa vie fut une succession de tentatives pour échapper à l'air catholico-national-socialiste typiquement autrichien, un air mortel pour les poumons, une succession de tentatives pour réhabiliter une langue allemande définitivement abîmée par une Honte nationale typiquement autrichienne. Avec le Cahier de l'Herne, il s'agit de la monographie la plus complète consacrée à Thomas Bernhard en français. On y trouve les contributions de quatre-vingt auteurs exprimant leur compagnonnage avec Thomas Bernhard. Ils y expliquent comment, chacun à leur manière, et à cent pour cent, leurs trajectoires furent déviées en rencontrant l'imprécateur au grand cœur. Quelques textes de Thomas Bernhard et des photos touchantes sont glissées habilement entre les témoignages et critiques. Les auteurs sont ou bien des proches de Thomas Bernhard, ou bien des auteurs plus ou moins influencés (on pense notamment à un très beau texte de W. G. Sebald), ou bien des metteurs en scène qui montent ses pièces et parfois adaptent ses romans au théâtre. Parmi les thèmes abordés, les rapports équivoques et douloureux de Thomas Bernhard à sa patrie, des rapprochements à d'autres grands auteurs (Ludwig Wittgenstein, Karl Kraus ou Samuel Beckett), une relation problématique avec la langue allemande, le style contagieux du monologue d'un tuberculeux, la musicalité et la déclamation des textes du baryton, la (grande) maladie et l'idée du suicide, les succès littéraires d'un "hollandais qui écrit des romans d'aventures", l'homme de théâtre dans un monde absurde.
"La forêt est grande, la pénombre aussi. Parfois à l'intérieur, il y a une chevêche qui ne vous laisse pas de répit. Je ne suis pas plus que cela. Et je ne prétends pas être plus."