Le début de La maîtresse de Carlos Gardel n'est pas très engageant dans le sens où le récit semble partir dans plusieurs directions à partir des souvenirs de Micaela, une vieille dame portoricaine au crépuscule de sa vie, qui se souvient de sa jeunesse. De sa liaison éphémère avec le roi du tango, de sa grand-mère guérisseuse, de son amour des plantes et de leur potentiel curatif, de sa carrière d'infirmière qui débute et de son ambition de devenir chercheuse, de la condition de la femme noire dans les Caraïbes. Tout ces sujets sont bien dans le roman de Mayra Santos-Febres et, après un début cahoteux (mais c'est sans doute le lecteur qui a besoin d'un temps d'adaptation), ils se déploient dans une grande harmonie, sertis dans un style capiteux et langoureux. Mais Gardel, bien entendu, est au centre du livre, même s'il est là aussi pour compléter le portrait de Micaela, jeune femme émancipée combattant le racisme des années 30 et bien décidée à se forger son propre destin. Quand la romancière raconte les succès de Gardel en Espagne, son age par Paris, sa tournée portoricaine, c'est ionnant. Lorsque Mayra Santos-Febres évoque plus particulièrement le parcours de son héroïne et la façon dont elle unit dans une même ion les progrès de la médecine moderne et les traditions ancestrales de son île, en utilisant les vertus de ses plantes, c'est tout aussi captivant !