Dans L’Irlande du XIXe siècle, les créatures magiques sont encore présentes. Sitôt qu’une maladie ou un accident arrive, elles sont de la partie, responsables de tous les malheurs par le biais de malédictions. Heureusement, quelques personnes disposent du don, connaissent les paroles, les sorts, les plantes et autres formules permettant de les contrer. Alors lorsque le mari de Nóra meurt brutalement, après que son petit-fils se soit mis à dépérir, elle va chercher l’aide de Nance Roche, la vieille du village qui est persuadée qu’un Changelin a remplacé son petit-fils et qui dispose des connaissances pour l’en expulser. Malheureusement la situation empire et l’arrivée d’un jeune curé ne croyant pas à ces superstitions envenime la situation dans le village.
Tout d’abord, soyons clair : bien que ce roman soit rempli de magie et de créatures féériques (les bonnes gens du titre original), ce n’est pas un roman de genre. Ce récit est l’adaptation d’un fait divers réel survenu en Irlande en 1826. Néanmoins, il devrait intéresser beaucoup de lecteurs et de lectrices de nooSFere : les créatures et évènements décrits dans ces croyances peuplent beaucoup de romans de fantasy inspirés des mêmes contes et légendes.
Les croyances partagées par une grande partie du village sont si fortes et si bien mélangées avec d’autres techniques (la connaissance qu’a Nance des plantes pour soigner) qu’elles semblent crédibles. Seul le jeune curé (qui y voit certainement de la concurrence) et la justice venue de la ville s’y opposent de manière frontale. Dans cette Irlande paysanne la population est laissée à elle-même : faire venir un médecin n’est pas dans les moyens de ces pauvres gens (le pays sera touché par une famine faisant plus d’un million de mort à peine vingt ans après) et même le curé doit être payé pour venir bénir un malade, laissant la place aux croyances les plus anciennes.
De ce fait divers terrible Hannah Kent fait un récit ionnant, insufflant la vie à ces personnages qui s’appuient sur ces êtres féériques pour expliquer et er les malheurs qui s’abattent sur eux. Cultivant l’ambiguité entre croyances et faits, elle mène le roman sans relâche jusqu’à son inévitable conclusion. Une œuvre remarquable.