Avec Sonic Advance 3, on entre dans le territoire des jeux qui divisent. Pour certains, c’est l’épisode de trop, celui qui complexifie la formule au point d’en trahir l’élan. Pour d’autres, c’est au contraire le plus dense, le plus audacieux, celui qui tente d’aller plus loin que la vitesse pure, en construisant un jeu de plateforme nerveux, presque technique.
Personnellement, j’y reviens avec un vrai plaisir. Parce que malgré ses embardées parfois maladroites, il a ce petit goût de maîtrise qui le rend ionnant.
Là où Advance 2 jouait la carte de l’élégance minimaliste, tu traces, tu mémorises, tu recommences, Sonic Advance 3, lui, opte pour la construction modulaire.
Chaque monde est désormais un hub semi-ouvert, avec des entrées de niveaux à débloquer, des PNJ à croiser, des dialogues contextuels… C’est une idée que certains trouveront gadget, mais qui change quand même le rythme. On est moins dans l’enchaînement mécanique de stages, plus dans une forme de progression “à la carte”. Et même si ces hubs manquent parfois de lisibilité ou d’intérêt en soi, ils posent un cadre plus organique à l’aventure.
Mais surtout, Advance 3, c’est le système de duo.
Là, c’est une vraie prise de risque. Tu choisis deux personnages parmi cinq (Sonic, Tails, Knuckles, Cream, Amy), un leader et un partenaire. Et selon l’association, tu modifies tes capacités, Tails avec Sonic donne un boost de vitesse, Amy avec Knuckles permet de rebondir, Cream avec Tails te fait voler plus longtemps… Chaque combinaison ouvre ou ferme certains chemins, certains objets deviennent accessibles, certaines routes s’ouvrent. C’est plus qu’un gimmick, c’est un moteur de redécouverte.
Ce système est un petit bonheur pour les complétionnistes. Chaque niveau a ses Chao cachés, ses chemins alternatifs, ses ages réservés à telle ou telle capacité. C’est un level design plus stratifié, plus segmenté, mais aussi plus riche. On te pousse à revenir, à tester d’autres équipes, à penser le jeu en termes de compatibilité de personnages. C’est presque du Sonic & Knuckles poussé à son extrême.
Lorsque je parlais de Advance 1 et 2, ici ils ont opté pour conserver ce défaut et en faire un force, en nous proposant un Sonic plus accès exploration et c'est ça qui a fini par diviser les joueurs.
Ce choix me plait, même si on est plus sur un Sonic, à proprement parlé, il ramène son originalité et j'ai pris du plaisir à l'exploration et à l'expérimentation.
Mais ce choix a un prix... La lisibilité prend un coup. Les niveaux sont parfois trop vastes, trop chargés, avec des arrières-plans qui bougent, des plateformes qui se confondent avec le décor, et surtout une vitesse qui devient difficile à contrôler. Là où Advance 2 brillait par son flow, ici on a parfois l’impression de forcer un peu le age. Certains stages sont brouillons, Cyber Track ou Chaos Angel en tête et on se prend des pièges injustes sans vraie possibilité de réagir. Ce n’est pas tout le temps, mais quand ça arrive, c’est franchement agaçant.
Côté personnages, la variété est encore plus marquée que dans les épisodes précédents. Sonic est rapide mais rigide, Knuckles est utile pour les raccourcis verticaux, Amy reste le challenge à elle seule (toujours pas de spin dash, toujours ce marteau à manier au bon moment), Cream est l’option facile, presque cheatée avec Cheese qui s’occupe de tout, et Tails reste une valeur sûre, surtout en partenaire. Mais c’est bien la synergie entre eux qui rend le tout intéressant. Tu ne choisis pas ton perso en fonction de ton style de jeu seulement, mais aussi en fonction de ce que tu veux débloquer dans le niveau.
Les boss, eux, sont un vrai pas en avant. Plus dynamiques, plus originaux, souvent mobiles, parfois même en “runner” automatique, ils brisent la monotonie des classiques “8 coups et c’est fini”. Certains sont un peu durs à lire, ou frustrants si t’es avec le mauvais duo, mais dans l’ensemble, ils ont du caractère.
Visuellement, Advance 3 pousse encore un peu plus les effets spéciaux, les scrollings parallaxes, les animations. C’est l’épisode le plus chargé graphiquement, parfois trop, mais il y a une vraie générosité. On sent que les développeurs se sont fait plaisir.
La bande-son aussi suit cette logique, plus nerveuse, plus marquée, parfois même un peu stridente, mais toujours inventive. Le thème de Toy Kingdom est un bijou, celui de Sunset Hill reprend le Green Hill emblématique avec un nouveau souffle. Les musiques collent à cette idée d’un Sonic un peu baroque, plus dense, moins immédiat, mais plus ambitieux.
Et au fond, c’est peut-être ça, Sonic Advance 3. L’épisode le plus ambitieux de la trilogie, mais aussi le plus complexe. Celui qui a sacrifié un peu de fluidité pour offrir un gameplay en profondeur. Ce n’est pas celui que je conseillerais à quelqu’un qui découvre Sonic. Mais pour ceux qui aiment vraiment cre, optimiser, comprendre les mécaniques sous le vernis, c’est une petite pépite.
Il a osé, il complexifie et certain se sentent trahi... Parce qu’il t’oblige à jouer différemment. J'aime bien ce genre de cracage, mais je peux comprendre qu'on lui préfère un Kirby.