Pokémon Insurgence
7.6
Pokémon Insurgence

Fangame de THESUZERAIN (PC)

“La perfection n'est pas plus faite pour nous que l'immensité.”

Citation d’Alfred de Musset


Il y a une vraie différence entre approcher un jeu pokémon en tant que première découverte vidéoludique de la vie d’un joueur et y venir ou y revenir une fois qu’on a pris connaissance des moyens artistiques dont dispose le médium pour y véhiculer ses messages. C’est une question de game design, ou plutôt de la façon même dont se construit l’art vidéoludique de pokémon. Il y a dans pokémon une réelle dissonance entre ce que le pitch, l’histoire et le game design racontent. Il est visible de différentes façons. Il y a par exemple l’idée d’une ligue pokémon qui n’a pas d’autre intérêt que d’être là, et dont la narration est souvent en sortie du fil narratif. De même, l’idée d’arènes basées uniquement sur des types est triste car elle limite grandement un des systèmes de jeu les plus complexes jamais créés. La mises en valeurs des nouvelles générations (souvent nouvelle région et nouveaux pokémon) révèle le manque de prise de risque quant au game design de la licence qui n’a pas significativement évolué depuis bientôt 12 ans avec la sortie de pokémon X et Y. Cette source de frustration de la part des joueurs est sans doute la cause principale du grand nombre de jeux pokémons non officiels : Fan Games et Hack Roms.


Parmi ces milliers de jeux annexes sortis, rares sont ceux qui se démarquent. Et parmi les jeux notables, rares sont ceux qui sortent de l’idée de remakes/version améliorés de jeux pokémons originaux pour se reposer sur le savoir-faire de GameFreak (exemple : Pokémon Liquid Crystal). Cela fait de pokémon Insurgence un miracle qui a en plus réussi à s’imposer durablement dans la communauté pokémon grâce à son développement de près de 10 ans. Pokémon Insurgence est une prouesse fabriquée par une des meilleures équipes jamais regroupées dans le cadre de la création d’un fangame. Des gens qui y ont é leur adolescence et le début de leur vie d’adulte.


La première chose que l’on remarque quand on lance le jeu c’est son approche qui se veut beaucoup plus narrative. Toutes son introduction a pour but de donner le ton de l’histoire toute en nous faisant découvrir la nouvelle mécanique d’Insurgence : les pouvoirs de Mew. Il y a aussi une certaine forme de piège dans cette introduction avec une exécution publique violente pour les standards de la série accompagnée de présence de sang, chose qui ne sera quasiment pas revu plus tard. Si on prend en plus en compte la présence d’un mode de jeu censé épurer la violence proposée en début de partie, on se rend compte que le scénario souvent abordé par son coté « mature » n’est pas représentatif de l’ensemble du jeu, et de son scénario. Alors, on se demande quel est réellement son scénario ? Je dirai qu’il est à l’instar du mode de production du jeu : épisodique. On ne retrouve pas un méchant central de l’œuvre, pas un conflit transcendant qui parcourt l’œuvre. Toutes les intrigues sont assez imperméables et galère a formé un ensemble consistent. Dans ses pires moments en therme d’écriture et de rythme, on a même l’impression d’une randonnée : on va à un endroit, on affronte quelqu’un, puis on continue la route, on affronte quelqu’un d’autre.



Le pire c’est qu’à l’instar de la violence dans l’œuvre, le scénario est involontairement piégeux car il propose son meilleur scénario, celui en rapport avec les cultes et le personnage du second Augure qui atteint sa conclusion et son apothéose, qui est aussi l’apothéose du jeu, avec les événements d’Hélios City. Le scénario n’arrivera plus jamais à revenir à ce niveau de qualité. Triste quand on sait que l’on n’est qu’à la moitié du jeu. Le pire c’est que même au sein de ce premier transect, l’histoire n’est pas égale. Il y a beaucoup de ville, comme Koril et Roggan town, et Metchi city ou il ne se e rien. Ce qui crée de vrais moments de vides surtout quand on sait que les événements postérieurs à l’intrigue d’Hélios City ont la fâcheuse habitude d’avoir un rythme beaucoup trop soutenu. Peut-être aurait on du introduire ici les 2 cultes absent de la première moitié de l’histoire sachant que Zenith échoue à prendre dans le scénario la même place que Jaern alors que c’est ce que les événements d’Ultira Town semblaient dessiner et que tout l’attrait dramatique qui entoure le personnage d’Audrey est amoindri par son apparition tardive, le peu d’altercation qu’elle propose et le rythme de son histoire qui se réalise plus ou moins d’une traite, entre les villages de Miara et de Nasca. On aurait aussi pu imaginer plus d’apparition de Perséphone et du culte de Darkraï. C’est aussi là qu’on se rend compte que le choix de s’inscrire dans un format 8 arènes + la ligue dessert le propose de l’œuvre et que ses donjons auraient pu être utilisés pour donner plus de substance aux différents cultes, chose qu’on ne voit que pour East à Hélios City. De plus, ces maîtres d’arène/conseil 4 qui sont, il faut le reconnaitre, beaucoup plus important dans l’intrigue que ceux des jeux originaux, n’auraient eu aucun problème à s’inscrire dans l’histoire de sorte à conserver une aura similaire à celle que le titre de maître d’arène sous entends. C’est notamment le cas pour Harmony et Anastasia qu’on voit s’en problème à la tête respectivement de l’Hôpital et d’Usine qui seraient les bâtiments caractéristiques de leur ville respectives. Le conseil 4 aurait sans problème pu être présentés comme des généraux du culte de la perfection et offrir ainsi un grand dénouement à l’histoire, bien plus que l’apparition de Nyx sortie de nulle qui casse les grandes thématiques de l’œuvre. De plus, dans les faits aucun des cultes n’acquièrent réellement d’identité propre, se reposant bien trop sur leur meneur. Même si ça donne un sens à l’idée évoquée dans l’histoire que les sbires des cultes sont justes des écervelés remplaçables qui n’ont pas d’attaches avec les valeurs de leur culte et son juste perdus ça impacte grandement la crédibilité de l’œuvre dans son ensemble.


En clair, tous ces fils narratifs : les 5 cultes, la quête de la ligue, Malde et la maladie de Deoxys, le monde distorsion et l’histoire de Torren avec ses Augures, s’emboitent très mal. C’est d’autant plus visible qu’ils ne progressent pas en dehors de notre point de vue dans la majorité des cas. On se retrouve moteur dans bien trop de situations ce qui réduit la crédibilité de Torren et la profondeur de sa mythologie. Aucun personnage ne dispose de suffisamment de temps à l’écran pour avoir un arc approprié. Ça se voit notamment avec les 2 rivaux. Si les gens se rappellent autant les événements d’Ultira c’est car c’est le seul vrai grand moment ou on peut les voir. Nora est très discrète dans la première partie du jeu et ne se révèle réellement que durant les événements du culte infernal et Damian disparait plus ou moins après le début de l’intrigue avec Malde, alors que celui-ci avait un arc très important avec sa mère. Malgré une continuité narrative plutôt bien articulée après le combat contre l'Augure, la suite n’arrive pas à suivre le niveau attendu par l’intro et le début du jeu. Je dirais même qu’Insurgence échoue artistiquement car il échoue à transmettre correctement les messages sous-jacents de sa proposition narrative.

Il peut sembler étrange aux vues de ma note que je e autant de temps à critiquer l’histoire. Mais c’est pour mettre en avant l’idée que ce n’est pas, comme on peut le voir parfois, la force de cet opus et que le travail de l’équipe Insurgence se repose sur ses propositions de gameplay. C’est lui qui écrit l'histoire, et c’est la proposition centrale d’Insurgence. Ce n’est pas une mauvaise chose et ça fait qu’Insurgence s’inscrit beaucoup plus dans la lignée de la licence que ce qu’on prétend.


L’une des propositions ludiques la plus appréciée de Pokémon Insurgence est sans doute les Delta Pokémon qu’on peut assimiler à des formes régionales. On y retrouve 197 pokémons répartis en 88 familles + un pokémon fabuleux unique (UFI) + MissingNo + 3 nouvelles formes primaires (Arceus, Rigigigas et Giratina) + 57 nouvelles méga évolutions qui viennent s’ajouter aux 47 déjà existantes (+ les 2 primos) et aux 721 pokémons des 6 premières générations. C’est un nombre de pokémons colossales et donc de possibilité de team building qui augmente fortement la rejouabilité du jeu. On reprochera cependant que la plupart de ces nouveautés sont physiquement impossibles à avoir dans l’intrigue du jeu car uniquement déblocable en postgame notamment avec la région d’Holon et le fait que l’on ne sait pas forcément qu’on peut se poser hors des villes quand on utilise l’Emolga Taxi. Ce problème est cependant commun à pokémon. Le fait de se baser sur des designs déjà existant permet une meilleure cohérence artistique ainsi que de bien plus beaux fakemons que la majorité des autres fangames ayant tentés l’expériences. En plus de l’aspect graphique, le jeu offre à ses pokémons de nouveaux types, dont certains que l’on n’a pas encore vu dans la licence comme feu-fée, de nouvelles attaques, de nouveaux talents mais aussi de nouveaux objets (comme les armures) qui rendent ces pokémons intéressants à expérimenter.

Cette liberté dans l’approchabilité de l’œuvre se marque par la présence de mode facile, normal (déjà très relevé) et difficile (avec niveau barrière, qui poussera à bout les possibilités techniques du jeu). Ces modes, changeables quand le joueur le souhaite pour ne pas le bloquer dans sa progression sont complétés par différents modes difficultés supplémentaires (Nuzlocke Mode, Solo Run, Iron Man, Randomizer…) qui viennent pousser la personnalisation de l’aventure personnelle a des stades encore jamais atteint dans la licence officielle.

Ce pic de difficulté ne serait pas possible sans la présence de la base secrète dont l’unique réelle but dans l’aventure sera de jouer avec les EV/IV de vos pokémons pour les rendre viables en stratégies. Pour des pokémons avec de mauvaises bases stats (comme Maraiste) il sera nécessaire de er par là si vous voulez les garder comme viable dans l’aventure. Heureusement l’argent nécessaire à ce travail ne sera jamais un problème. C’est aussi pour ça que l’on donne une alternative au CS et des CT réutilisable sans quoi le jeu serait vite impossible à prendre en main. Entre autres, la présence du Pikataxi est une nouveauté qui devrait être ajouté à la licence officielle depuis et l’EmolgaTaxi ouvre vraiment l’espace de jeu même s’il est difficile de s’en rendre compte la première fois qu’on le prends. Malheureusement, l’aspect esthétique des bases secrète qui se limite surtout aux poupées pokémons tout comme l’habillage du personnage (un costume, le reste étant un changement de couleur) n’est pas à la hauteur de la pub que les sites en font. De plus, l’entrée de ladite base secrète, bien que logiquement mis en place pour le réseau du jeu est beaucoup trop visible ce qui casse un peu l’ambiance voulu. L’aspect rigolo mais secondaire du jeu réside aussi dans les attaques de bases d’autres joueurs, chose relativement secondaire qui donne cependant accès à des pokémon indisponible ou du moins très compliqué d’accès dans le jeu de base. L’aspect communautaire du jeu est aussi visible via le système de pokémons offerts et de pokémons échangeables.

Torren est une région correcte mais très linéaire qui disons le franchement galère à marquer les esprits par son panorama. L’effort fait pour la rendre survolable la rend cependant beaucoup plus marquante que la plupart des mondes de pokémons. Les musiques remontent beaucoup la pente et à mon sens participe à l’ambiance plus mature de l’œuvre au même titre que le scénario. L’histoire est agrémentée de plusieurs minijeux qui ont pour uniques défaut de ne pas s’insérer dans l’intrigue du jeu ou au moins dans une quête secondaire. Pokémon Insurgence bénéficie en plus d’un très bon postgame qui ressemble à celui de platine avec une nouvelle grande zone à explorer et quelques dernières petites quêtes à gauche à droite à compléter.


En conclusion, Pokémon Insurgence n’est pas un bijou de d’écriture. Il a des problèmes de rythmes, est parfois très verbeux, et échoue à créer des personnages marquants avec des parcours initiatiques qui racontent quelque chose sur les thèmes centraux de l’œuvre qui semblent être le rapport à l’endoctrinement, la place du héros, la difficulté d’être dans le juste, les conflits familiaux et l’existence de la perfection. Mais l’histoire n’a jamais été le centre des jeux pokémon et vanter une quelconque plume est plus associable à un mauvais marketing. Pokémon Insurgence poursuit cette lignée et offre une proposition ludique bien supérieure aux jeux de la licence pokémon en poussant le curseur de la complexité stratégique de son monde. Pokémon Insurgence n’est peut-être pas le fangame qui enterra tous les fangames, mais il est un jeu dont il est plaisant de voir car il ose là ou Nintendo a toujours éviter de tenter.


The Insurgent will be cast aside forever

Nyx


7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Mon équipe dans les différents jeux Pokemon

Créée

le 15 avr. 2025

Critique lue 52 fois

2 j'aime

1 commentaire

Lordlyonor

Écrit par

Critique lue 52 fois

2
1

D'autres avis sur Pokémon Insurgence

“La perfection n'est pas plus faite pour nous que l'immensité.”

Citation d’Alfred de MussetIl y a une vraie différence entre approcher un jeu pokémon en tant que première découverte vidéoludique de la vie d’un joueur et y venir ou y revenir une fois qu’on a pris...

le 15 avr. 2025

2 j'aime

1

Du même critique

Réaliser cent utopies pour que les espoirs déent enfin la nostalgie

Citation de D. Wynot C'est moi ou ce film vous fait pas penser à Casseurs Flowters , Des histoires à raconter ? Commençons 2020 avec un film que je ne voulais pas voir à la base, la bande annonce...

le 1 janv. 2020

51 j'aime

7

Joker
10

C'est beau la folie putain J'ai enfin plus peur de m'ennuyer

Titre extrait de "C'est Beau La Folie" de Lomepal Je spoile Bon on s'attaque à du lourd parce que Le Joker est sans aucun doute le meilleur film de 2019 -"Mais Lyo y'a 20 jours tu nous disais que...

le 9 oct. 2019

51 j'aime

9

L'idiot n'a point de cervelle, mais il a de sacrées mandibules

Titre tiré de la citation de Henri-Frédéric Amiel: "L'idiot n'a point de cervelle, mais il a le croc venimeux" Qu’on aime ou qu’on déteste, il faut bien avouer que le cinéma de Quentin Dupieux ne...

le 20 mai 2021

50 j'aime

12