Matt Walsh nous pond un mockumentaire pouvant rappeler sur la forme Religolo (Religulous) de Bill Maher. Il fera aussi, deux ans plus tard, un film sur l’antiracisme Am I Racist?, ou cette fois il ira jusqu’à opter pour un style à la Borat où il aura le rôle d’un imposteur la majeure partie du film.
Problème, le stoïque Matt Walsh n’est pas un bon comédien, il n’est d’ailleurs pas un comédien du tout, ce qui peut rendre la démarche un peu malaisante, surtout dans Am I Racist?.
ons outre la forme, Walsh va interviewer différentes personnalités dont l’activité professionnelle a un lien avec la transidentité en dissimulant initialement ses convictions. Evidemment Walsh est plus biaisé que la courbe de popularité de Macron à ses débuts, il ne montre que ce qu’il a envie de montrer et ne parlons même pas du montage.
Cependant, il laisse la parole à ses intervenants et ça suffit pour se faire une idée de ce qu’est le wokisme, c’est-à-dire un dévoiement de la cause progressiste pour une sorte de délire sectaire postmoderne basé sur le ressentiment envers la majorité dominante et l’exaltation des minorités opprimées sans discernement rationnel.
Le genre, selon les wokes, n’est ni fondé sur des critères biologiques (sexe, chromosomes), ni sur des critères socioculturels (Cf. la loi française de 2016). Le genre est inné, et est simplement revendiqué en se basant sur le ressenti subjectif de la personne, trans ou pas, et n’est basé sur aucun critère observable ou mesurable. En gros, le concept d’ « identité de genre » va faire que n’importe qui peut revendiquer n’importe quelle étiquette sans la moindre contrainte, et si vous trouvez que c’est problématique, vous êtes transphobe. Ces étiquettes ne se limitent à pas la binarité homme-femme, le genre est devenu « une mosaïque » dixit Marie Cau, maire transgenre qui ne reconnait pas que le genre soit un spectre.
Les wokes considèrent que les personnes trans doivent être crues inconditionnellement. Tout doit être fait pour qu’elles puissent affirmer leur genre revendiqué comme elles l’entendent, même si les traitements sont très controversés, même si la personne est très jeune et influençable, et peut donc se tromper.
Les wokes exigent une égalité parfaite entre une femme trans et une femme non trans dans tous les aspects de la vie en société. Le but est ainsi d'artificiellement préserver les personnes trans de toute forme d’adversité, en imposant une définition non consensuelle de ce qu'est le genre. La moindre critique, la moindre différence de traitement va briser le narratif égalitaire, d’où l’attitude extrêmement défensive de certains intervenants que l’on peut voir dans le film qui refusent viscéralement ne serait-ce que de débattre de certains sujets.
Alors qu’est-ce qu’une femme ? Qu’est-ce que le genre ? Walsh oppose la définition woke à la définition biologique, c’est-à-dire la définition réactionnaire. Or son point de vue est purement conceptuel, et il ne précise pas ce qu’il convient de faire concrètement. On traite les femmes trans exactement comme des hommes ? Et on les envoie consulter des psychiatres jusqu’à ce qu’elles soient « guéries » ?
Il existe une troisième définition du genre, celle qui se base sur la réalité, toute la réalité et rien que la réalité. Le genre n’est pas un spectre, les deux genres sont chacun un spectre, et sont basés à la fois sur des critères biologiques, pas seulement le sexe, et sur des critères socioculturels, c’est-à-dire inventés par l’homme.
Il n’y a pas de stéréotypes de genre, les genres sont fondés sur des stéréotypes auxquels nous devons tous nous conformer dans une certaine mesure. Une femme peut avoir naturellement des traits physiques masculins (voix, visage…) ou aimer le foot. En revanche, une femme ne peut pas être barbue et s’appeler Gérard. Un homme peut être père au foyer et avoir les cheveux longs. En revanche, un homme, même s’il en a envie, ne peut pas sortir dans la rue en robe rose (pas un travesti, imaginez un homme en robe non rasé, non maquillé et sans perruque…). La pression sociale nous pousse à nous conformer aux stéréotypes. Quand les mœurs évoluent, les spectres changent et peuvent s’élargir. Peut-être même que dans un futur très lointain, l’humanité aura évolué au point que d’autres critères biologiques de genre apparaitront.
Mais dans tout ça, est-ce qu’une femme trans est une femme ? Le terme « femme trans » se suffit à lui-même, il signifie qu’une femme trans n’est pas une femme comme les autres. Une femme trans peut changer son état civil, mais elle ne peut pas se permettre de cacher qu’elle soit trans à un homme avec qui elle voudrait sortir.
Une femme trans est une femme, non pas à cause de son « identité de genre », une femme trans est une personne qui a au minimum suivi une transition social et ainsi se conforme à une partie des critères de genre en dépit de sa biologie. On ne peut pas s’identifier à une personne gentille si dans les faits on est une vraie peau de vache. Notre genre n’est pas celui que nous revendiquons, mais celui que nous vivons.
Ce refus obstiné des wokes d’accepter que les femmes trans soient différentes mène aux dérives que l’on voit dans le film, qui ne constituent qu’une petite compilation. Par exemple, les wokes vont jusqu’à traiter de transphobe les lesbiennes qui refusent de sortir avec des femmes trans parce qu’elles sont trans. Le genre fonctionne un peu comme l'âme dans la religion, il y des âmes d'homme, de femme, de non-binaire... Or, les orientations sexuelles se basent sur des critères concrets, pas sur des spéculations abstraites.
Matt Walsh est assez pervers parce qu’il ne cherche pas à faire la distinction entre d’éventuelles nuances de progressisme, il va pointer du doigt la mouvance woke afin de diaboliser le militantisme pro-trans qui semble être monolithique et immuable dans le film. Même Mélenchon reconnait que la théorie du genre est fausse.
Mais ce qui est vraiment problématique n’est pas la démarche de Walsh qui ne surprendra personne. Ce qui est inable est que ce soit un affreux réactionnaire comme Matt Walsh qui dénonce ces dérives, alors qu’historiquement le scepticisme était classé à gauche. Bill Maher, soutien de Bernie Sanders, satirise dans son show aussi bien les républicains que les démocrates, ce qui n’était pas le cas il n’y a encore pas si longtemps.
Walsh a indéniablement marqué des points, même dans le malaisant Am I Racist? où il dénonce à juste titre l’absurdité de la théorie critique de la race, même si ses méthodes sont plus que douteuses.
On peut aussi noter le singulier manque d'empathie de Matt Walsh, d'autant plus flagrant dans des clips absents du film que l'on trouve facilement sur le web. Alors que même Bill Maher s'était attiré un minimum de sympathie de la part d'une partie de ses interlocuteurs dans Religolo. Il a serré dans ses bras un ancien gay qui défend les thérapies de conversions pour les homosexuels.
Le film a le mérite de mettre en lumière une des raisons de la réélection de Trump. Si le vote Trump était plutôt stable, en revanche Kamala Harris a été boudée par son électorat en partie à cause de l’obsession démesurée du parti démocrate pour les délires wokes et pour le politiquement correct à outrance. On pourrait aussi parler des retentissants échecs commerciaux des grosses productions wokes de la culture populaire.
What is a Woman? aurait pu s’intituler Comment se tirer une balle dans le pied, parce que non, le progressisme ne devrait pas fonctionner comme une religion, même au pays des sectes.