Restitution de la violence et de la rédemption qui composent le bois dont sont fait les soldats.

C’est la très belle histoire vraie d’un objecteur de conscience qui sauva des dizaines de soldats blessés pendant la guerre du Pacifique. On le voit enfant, adolescent puis pendant ses classes et enfin à Okinawa en 1945.

La narration est classique et les scènes de guerre sont dans la veine ultra-réaliste inaugurée par le Saving Private Ryan en 1996.

La thématique est proche de celle du film Flags of our Fathers - Mémoires de Nos pères ( 2008) de Eastwood sur Iwo Jima. Cette ile fut envahie par les américains juste avant Okinawa.

Cette dernière était l'ultime rempart avant l’invasion du Japon, ce qui conduisit l’armée japonaise à des combats féroces et jusqu’au-boutistes, suicidaires tant de la part des soldats que des civils japonais. Cette attitude était difficile à comprendre pour des occidentaux mais elle est très bien documentée, déjà dans les combats précédents de nombreuses iles du Pacifique, notamment à Iwo Jima, mais cela atteint des proportions inouïes à Okinawa, qui est l'arrière-fond de ce film-ci Tu ne tueras Point.

Les deux seuls autres films de guerre américains sur cette célèbre bataille ont été tournés en 1951 (Halls of Montezuma de Lewis Milestone, Okinawa pour le titre français) et en 1952 (Okinawa, de Leigh Jason).

On dit de Mel Gibson qu'il met en scène de la violence et de la rédemption comionnelle, et beaucoup lui reprochent ce mélange, comme si cette combinaison était plus toxique que de mettre en scène seulement l’une ou seulement l’autre, comme si dans la vraie vie il n’y avait pas un bois composite en chacun. Et pourtant, ces dimensions sont toujours combinées dans les personnes - et en particulier pendant les guerres - avec plus ou moins d’intensité pour l'une ou l' autre, plus ou moins de conscience et plus ou moins de déni, le plus et le moins évoluant avec le temps à l'intérieur des survivants, parfois en sens inverse.

C'est ce qui donne leur contenu à toutes ces descriptions de vétérans hantés par leur actes és, notamment par des atrocités commises sur le moment en toute bonne conscience (par exemple les oreilles coupées comme des trophées) ou devenus mutiques de ce qu'ils ont pu subir ou voir de leurs amis ou camarades de combat, ou devenus fous ultérieurement de violence compulsive après la guerre.

Mais le stress post traumatique des guerres n'est que récemment devenu une conséquence commune des batailles vécues : il était autrefois completement méconnu, malgré de nombreux documents, notamment les souvenirs et les récits de guerre, qui exprimaient ces dimensions combinées, avec une justesse clinique confondante.

On a pu malgré cela édulcorer ces symptômes en de la matière romanesque, y compris pour de tres nombreux films, alors que même en remontant aux plus anciens récits, on retrouve toujours des combinaisons insolites de ces composants contradictoires en chacun (agressivité, comion, violence, haine, solidarité, vengeance, sacrifice) ce qui leur donne une grande force, même si le talent compte dans leur restitution (le sommet étant les descriptions écrites dans Dispatches - Putain de Mort, de Michael Herr, 1977).

Mel Gibson a beaucoup de talent pour leur restitution au cinéma. C'est pourquoi le film est si percutant, au delà de l'histoire particulière et remarquable de cet objecteur de conscience qui en est le fil conducteur.

(Notule de 2020 publiée en mai 2025)

9
Écrit par

Créée

il y a 3 jours

Modifiée

hier

Critique lue 7 fois

4 j'aime

Michael-Faure

Écrit par

Critique lue 7 fois

4

D'autres avis sur Tu ne tueras point

La dernière tentation du fist

Rater un film est à la portée d'à peu près tous les réalisateurs. Presque tous, même les plus grands, ont un jour loupé la marche de leur ambition. Non, le vrai exploit, c'est d'arriver à rater...

Par

le 22 févr. 2017

141 j'aime

85

Le triomphe de la volonté

Il a beaucoup été reproché aux distributeurs français le titre francophone Tu ne tueras point en lieu et place de Hacksaw Ridge, qui désigne l'endroit où se tient la bataille au cœur du nouveau film...

le 1 mars 2017

137 j'aime

15

Tu ne riras point

Un vegan bigot oppressif décide d'aller faire la seconde guerre mondiale à mains nues. Au début il e pour un con, se fait bolosser par Vince Vaughn, et finit en cour martiale, mais s'en sort...

Par

le 9 nov. 2016

89 j'aime

20

Du même critique

Western pro indien qui brode autour du véritable "massacre du camp Grant" de 1871

Western "pro indien" de la Fox (qui a plus de moyens pour ses films que Universal, qui produit à l’époque la majorité des  westerns de Serie B) par un des initiateurs du genre (Broken Arrow - La...

le 17 avr. 2025

7 j'aime

2

Sept hommes à abattre
10

Pas "le meilleur western de tous les temps" mais presque, bravo Budd Boetticher

Que dire de plus de ce western, un des plus commentés depuis que le critique George Sadoul a dit de lui, peu de temps après sa sortie, qu'il était le meilleur western de tous les temps ? Juste...

le 27 janv. 2025

7 j'aime

Hitch renouvelle ses anciens films d'espions en intégrant le côté sombre des années 60

Il est à la fois dans la veine des films d’espionnage que Hitchcock a tourné la décennie précédente (installation progressive d’un suspense de plus en plus haletant, comme North by Northwest ou...

le 8 déc. 2024

7 j'aime

1