Voici un film âpre et rude, le premier que je vois au FF où il n'y a pas d'humour pour contre-balancer les tensions.
C'est filmé en 4/3, au plus près des corps et des visages (quasiment pas de plans larges), en plans assez longs, et sans musique.
A travers deux jeunes appelés du service militaire en permission, le film s'attache à dénoncer la violence institutionnalisée qui régit la société coréenne : les deux sont soupçonnés d'avoir dénoncé leur sergent pour sévices. L'un des deux se fait casser une dent par un caporal, et l'autre l'emmène voir son beau-frère dentiste dans une ville proche. Là, on se rend compte que le dit beau-frère frappe sa femme régulièrement.
Avec ce film, on s'aperçoit que la violence est partout: elle commence au service militaire, où chacun, suivant une chaine de commandement de la violence, brime, harcèle, frappe son subordonné. Elle continue dans la société, elle est intériorisée, considérée comme normale : un ami du dentiste dit que son époque était pire, et semble regretter l'adoucissement supposé du service militaire. Le beau-frère frappe sa femme et n'en a aucun regret, il promet juste d'être plus gentil, mais on sent qu'il dit ça comme un alcoolique qui promet d'arrêter la bouteille. Et sa femme, comme beaucoup de femmes battues, ne veut pas quitter le foyer, et espère peut-être qu'il arrêtera.
Pas d'espoir, justement, dans ce film, où chacun est le bourreau d'un autre, et où les victimes sont ceux qui n'ont personnes en-dessous d'eux pour reproduire la violence qu'ils subissent...