Le retour d'un Wes Anderson produit toujours son petit effet, surtout la production d'un nouveau film qui suit une réalisation maîtrisée comme "Asteroid city".
Avec Asteroid city on se trouve d'après moi dans ce que j'appelle "les films de patron", qui sont des films pour lesquels l'auteur a atteint un niveau de maîtrise thématique et esthétique tel de son style qu'on ressent au visionnage ce point culminant. À titre de comparaison pour rester dans les auteurs grand public, j'avais retrouvé la même sensation avec le Once Upon a Time... in Hollywood de Tarantino.
Qu'est-ce qu'un auteur peut sortir à la suite d'un tel projet? Si l'un se retrouve complètement bloqué dans son raisonnement l'autre fait le choix de réaliser un film plus décomplexé.
Alors au vu de ma note, on peut se douter que j'ai effectivement aimé ce film qui se veut être un voyage plutôt drôle d'un père et de sa fille pris entre plusieurs feux.
Mais la raison pour laquelle je me décide à écrire ces lignes est liée à la réflexion que j'ai vu fleurir depuis la mise en ligne de la bande annonce de The Phonician Scheme : "Mais Wes Anderson, il ne se renouvelle jamais, il fait toujours la même chose?"
Je me suis d'abord demandé pour quelle raison on pouvait reprocher à un auteur de reprendre ses thématiques et d'en réaliser des variations ? La réponse m'est alors apparue évidente les thématiques de Wes Anderson sont enrobées dans une forme très distinctive ce qui rend plus évident de développer cette pensée.
Mais vu que cette forme est si importante, est-ce qu'elle ne veut pas raconter quelque chose au-delà de l'aspect purement esthétique ?
Utilisation des aplats de couleurs? Permet-il d'accentuer le côté fable des récits et l'ironie souvent développée entre la gravité des évènements montrés et les réactions dans le monde de Wes Anderson ? De séparer ou non les personnages avec du color blocking?
La symétrie des plans, est-ce qu'elle permet de créer également un subtil paradoxe entre des personnages souvent perdus et en recherche de sens avec une réalisation ultra millimétrée comme si un (faux) ordre existait dans ce chaos?
Les nombreux travellings avant ne rappellent-ils pas aux personnages qu'il faut continuer le mouvement et ne pas rester figés dans la symétrie du cadre préétabli ?
D'ailleurs pour The Phoenician Scheme je trouve que ce décalage entre le fond et la forme se révèle souvent particulièrement drôle dans son utilisation.
Le contrecoup à payer de ce style reste cependant que la distance établie avec les personnages rend difficile d'activer le lien émotionnel avec nous, spectateurs.
Mais ce gap, comme Zsa-zsa Korda qui cherche à le combler durant tout le film, d'abord au travers des autres avant de s'engager personnellement, n'équivaut il pas au chemin que doit parcourir le réalisateur et le spectateur pour voir se réaliser le projet d'une vie?