Barry Levinson, 70 ans, avec une carrière riche et contrastée, démontre une vitalité surprenante dans son dernier long métrage.
Parti pour réaliser un documentaire écolo sur la baie de Chesapeake, morte à 40%, il prend rapidement un chemin différent pour aller vers un docu-fiction, boudé par les studios, et produit en toute indépendance pour à peine plus de 2 millions de dollars(sortie simultanée sur itunes et sortie "technique" en salle aux US).
Loin de sa bande-annonce racoleuse, The Bay n'est pas un énième found-footage de plus, ni un simple film d'horreur.
Il est le témoin des peurs d'une époque, comme le nucléaire dans les années 50, puis la guerre froide ou encore la période post 11 septembre.
Le postulat de départ, très bien documenté, dénonce les dérives de l'industrie de l'agro-alimentaire(l'élevage de poulet, parfaitement décrit dans le pamphlet "Faut-il manger les animaux ?") à l'origine du développement du parasite "Cymothoa exigua" qui existe réellement(merci à @Spark et @xUMI pour l'info !), la seule différence est qu'il ne s'attaque qu'aux poissons...
Et bien sûr, les acteurs locaux et les instances nationales participent à ce cauchemar qui se prépare.
Sur le plan formel, la redoutable efficacité du montage atteint parfaitement son but.
En multipliant les points de vue, utilisant tous les s numériques existants (smartphone, caméras de surveillance, caméras persos, appels téléphoniques,Skype,SMS...), auxquels nous sommes totalement coutumiers, cela renforce évidemment l'immersion, d'autant que le rythme élevé est parfaitement maîtrisé.
Une petite touche d'humour, assez cynique sur le sensationnalisme des médias, ou plus légère (Miss Crabe, la journaliste qui court comme une folle autour de la fontaine après un coup de stress..et bien sûr l'équipe de scientifiques) est également bien distillée.
D'ailleurs, pour moi, l'intervention de la journaliste qui raconte cette histoire, la façon dont elle décrit la journée, a un côté "faites entré l'accusé" dans son montage et ses effets, parfois tape à l'oeil, mais parfaitement voulu -j'en suis sûr- par son réalisateur, pour évoquer toujours ce rôle ambigu des médias dans les grands événements.
Dommage, que par moments, à force d'accumuler les différentes séquences de stress, une certaine redondance apparaisse. C'est également le cas pour une ou deux séquences de jumpscare (dans l'auto à la fin, un peu facile..)
Au-delà du film de contagion très efficace, The Bay est en seconde lecture un instantané parfait de notre société, inondée de flux permanents de toute sorte, mais finalement peu réceptive (ou détournée) des sujets vitaux comme le risque écologique qui nous menace, dont les médias et les instances sont souvent complices...