Énorme, terrifiant, un chef-d'oeuvre.
L'histoire d'un vieillard rongé par le remord au milieu d'un pays dont la soif de sang communiste ne s'est jamais épanchée. Les gangsters, la mafia, le gouvernement corrompu, la milice ; personne ne regrette. Les meurtiers et les violeurs d'antan se présentent au parlement, l'extorsion est toujours pratiquée quotidiennement.
La force de The Act of Killing réside surtout dans sa propension à générer des situations horriblement absurdes. Un bourreau se vante d'avoir violé des fillettes de quatorze ans, l'autre d'avoir assassiné le père de sa petite amie ; le fils d'un communiste assassiné s'excuse face aux meurtriers de son père. La télévision vante les mérite d'Anwar Congo, qui a inventé une manière plus "humaine" de tuer les ennemis du peuple. Les bourreaux se travestissent, ridicules : ils vivent avec ce qu'ils ont fait, riches, célèbres, toujours mafieux, craints et respectés par tous.
Au milieu de ce chaos insensé, Anwar Congo prend doucement conscience de ce qu'il a fait. Il ne dort pas, il boit "un peu", se drogue "un peu." Lentement, le vieillard sympathique ouvre les yeux. Coupable de crimes contre l'humanité, La Hague n'aurait aucune pitié à son sujet. Pourtant, en tant que spectateur, je n'ai pas réussi à la condamner. C'est l'autre force de The Act of Killing. Anwar Congo est un trait de lucidité au milieu de l'enfer, une entité lucide face à l'horreur de ce qu'il a commis. Il regarde fèrement la mise en scène de son propre meurtre sur sa télévision accompagné de ses petits enfants, comme une libération, une transcendance. De retour sur les lieux du massacre, il est pris de violents hauts-le-coeur ; il veut dormir, il veut mourir, enfin.
Je lui souhaite de trouver le repos. Ce film me hantera longtemps.
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