L'affiche et le synopsis nous amènent à nous y méprendre, mais il ne s'agit pas d'un Délices de Tokyo bis, et encore moins à une chronique sociale tout court s'inscrivant dans une volonté de réalisme. Chez nous inconnue au bataillon à ce jour, Akiko Oku dresse avec Tempura d'apparence ordinaire, ce qui est trompeur puisque le développement soulève un conte d'une modernité éclatante.
Tempura n'est pas une oeuvre collective, loin de là ; é l'ouverture, avec sa caméra type reportage aérienne à souhait, la cinéaste privilégie les plans serrés, une prise de son momentanément indépendante de tout le reste, et par ailleurs un réjouissant jeu de bruits en guise de motifs, rythmant tout le long du film.
La progression de l'héroïne de l'aveuglément vers la clairvoyance se laisse entendre tout particulièrement au seuil de deux séquences majeures successives :
la séquence de l'avion, et celle de l'escale romaine, confrontent cet univers discret et élégant à des peurs ancestrales.
Le spectateur est pris tout du long par le joli bordel visuel s'appuyant principalement sur la confusion entre réflexions personnelles, rêves et séquences réelles. Ce ruban de Möbius, avec un petit côté lynchéen en plus évident, montre Mitsuko à fleur de peau, encombrée par une considérable anxiété sociale. L'atmosphère inconstante du film nous la montre sous une pluralité étourdissante de facettes et nous la rend profondément attachante. Ajoutez à cela, une très belle bande originale dans le plus pur folklore.
Euphorisant et d'une efficacité redoutable en dépit de certaines baisses de régime insistantes, Tempura est une boule de tendresse d'une sincérité précieuse, déconstruisant la moyenne du cinéma contemporain pour en tirer des merveilles. Une cinéaste à suivre, assurément.