Un chef d’œuvre absolu. Jamais le cinéma de Stanley Kubrick n'aura autant manifesté sa brillance technique et stylistique qu'avec The Shining. Alimentant et densifiant au maximum un scénario pour le moins ténu la réalisation de cette référence majeure joue énormément sur la symbolique et les nombreuses codifications intrinsèques au roman originel de Stephen King.
A partir d'une écriture en apparence rudimentaire Kubrick met un point d'honneur à construire tout un imaginaire horrifique et fantastique, redonnant ses lettres de noblesse à l'architecture des décors et apposant une atmosphère énigmatique à son onzième long métrage. Par ailleurs la composition fracassante de Jack Nicholson est un véritable tour de force dramatique, l'acteur parvenant à traduire le divorce psychologique de Jack Torrance avec une prestance sans précédent dans sa carrière : volontairement excessive, parfois même incongrue son incarnation tient pratiquement du génie...
En outre Shelley Duvall défend très honorablement son personnage de femme-outil, arborant une présentation évoquant l'univers gothique et souterrain des films de Georges A. Romero ; souvent critiquée pour cette prestation en-deçà des attentes du public l'actrice met irablement en valeur la folie étincelante de Nicholson, assumant pleinement son rôle de faire-valoir d'un bout à l'autre. Quant à Scatman Crothers, charismatique et bienveillant, il apporte toute la dimension chaleureuse du roman de King, dimension peu présente dans l'Oeuvre kubrickienne.
Le répertoire musical se marie remarquablement à la fluidité de la réalisation, principalement constitué de thèmes néo-classiques et de sons proches du brouillage. On retiendra notamment la magistrale utilisation de Bartok et de sa Musique pour cordes, percussion et célesta dans une séquence particulièrement troublante et dérangeante. The Shining affiche sa superbe des premières aux dernières secondes, se rangeant définitivement parmi les incontournables de l'Histoire du Cinéma. Inlassable.