Une cellule de béton meublée d’un de ces matelas pour chien et d’un grand perchoir en bois. Un homme, cheveux long et à moitié à poil, est perché sur cet étrange objet. Une équipe de docteurs et d’infirmiers entre dans cette grande pièce et propose à Fénix -le monsieur chevelu- un plateau de nourriture. Fénix le refuse. Le docteur propose alors un poisson cru que Fénix dévore à pleine dent. La première scène surprend et déstabilise. Surtout elle plante le décor, les situations loufoques vont s’enchaîner pendant un peu moins de 2 heures. Alors accrochez vos ceintures et préparez-vous mentalement à vous prendre une belle mandale de poissonnier dans la tronche.
Un enfant magicien au père lanceur de couteaux et à la mère vénérant une sainte sans bras. Une femme couverte de tatouages qui exploite une jeune funambule sourde et muette. Un nain sympathique et des clowns tristes qui forment la troupe d’un cirque pas comme les autres. Un gangster qui conduit des adolescents trisomiques dans les bras grassouillets d’une prostituée obèse. Les destins atypiques et abracadabrantesques défilent devant nos yeux. On est trimbalé d’un univers étrange et unique à un autre, les scènes épiques aux décors envoûtants se succèdent. Jodoroswki semble prendre un malin plaisir à nous déstabiliser. Beaucoup de folie mais contrairement à de nombreux films expérimentales, on ne se perd pas dans une narration farfelue. Au contraire, il nous livre une histoire étrange mais simple, qui laisse la place à de nombreuses interprétations.
Le jeune enfant magicien -qui n’est autre Fénix- grandi interné suite au destin tragique du cirque familiale. Une sortie en ville agrémentée d’une rencontre inattendue vont faire rejaillir les fantômes du é. Fénix s’échappe alors pour retrouver sa mère, amputée des deux bras. Il substitue ces membres manquants par ses propres bras et tombe petit à petit sous le joug de cette mère autoritaire. Le couple improbable décide de repartir vivre dans leur maison d’entant et se lance dans un voyage mortuaire où ils sèment les cadavres partout où il e.
Fénix et son esprit troublé se débattent avec son lourd é, et entre meurtres et hallucinations, il est de plus en plus difficile de discerner ce qui relève du réel ou de la folie du bonhomme. La mise en scène et les plans magnifiques bariolés de couleurs entretiennent à merveille cette perte de repère.
Drôle et émouvant, sanglant et sensuel, poétique et horrifique, ce film de Jodorowski est tout simplement étrangement génial.