Un western à la croisée des chemins

Quand Giuliano Carnimeo s’attelle à ce film, il en est à son septième western et commence à bien connaître la musique, d’autant plus qu’il reprend comme premier rôle Gianni Garko qui a déjà interprété pour lui deux épisodes de Sartana. En cette année 1971, le western parodique a déjà commencé à envahir les écrans, annonçant le déclin puis la mort du genre. L’inquiétude est donc de mise quand on découvre que c’est Enzo Barboni qui est à l’écriture. Le père de Trinita et de ces bouffonneries westerniennes qu’il tourna avec le duo Terence Hill – Bud Spencer sont proches. Heureusement, si on retrouve la fantaisie de certaines de ses idées loufoques, Giuliano Carnimeo est un réalisateur qui a en estime le genre et qui ne veut pas que son film parte dans tous les sens. Une glissade vers la pantalonnade serait d’autant plus préjudiciable que l’intrigue met en scène deux durs-à-cuir qui n’ont rien de grand rigolo. D’un côté, donc, Gianni Garko interprète le fameux « L’Étranger » qu’on surnomme aussi « Cimetière », et, de l’autre, William Berger, parfait en pistolero mystérieux et avide au gain.


Le début laisse un peu craindre le pire avec un humour parfois potache mais le réalisateur le délaisse bien vite pour un ton, certes toujours léger, mais avec une caractérisation de ses personnages assez astucieuse qui permet de s’attacher très vite à l’ensemble des protagonistes, bons ou mauvais. Au milieu de nos deux pistoleros qui ne visent pas les mêmes intérêts, deux jeunes blancs-becs font l’apprentissage de la loi du pistolet et de son maniement. L’Étranger sera leur mentor alors que le Duc semble avoir été payé pour les liquider. Si les deux hommes s’estiment, on voit monter la rivalité entre les deux hommes comme il pourrait en être question dans une tragédie. Mais le ton du western n’est plus aussi noir en 1971 qu’à ses débuts. Il ne s’agit plus de dénoncer l’âme sombre des hommes mais d’offrir un divertissement pétaradant et léger.


C’est assurément le gros point faible de ce film qui, une fois ses enjeux posés avec une remarquable efficacité, se perd dans une bagarre loufoque de saloon et dans un final où les incessants coups de pistolet offrent un spectacle redondant et pauvre. La rigueur perdue de la première partie du récit fait indéniablement retomber l’ensemble de plusieurs étages dans un western de série aux effets faciles. La belle musique de Bruno Nicolai, la photo toujours soignée de Stelvio Massi et le joli duo de personnages permettent de maintenir le résultat à un certain bon niveau mais on regrette que le propos ne soit pas mieux tenu jusqu’au bout. C’est, malgré tout, très divertissant et recommandable pour les amoureux de western à l’italienne.


6,5/10

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le 25 nov. 2024

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PIAS

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