Abonné aux remakes, Alexandre Aja, accompagné de son fidèle acolyte Gregory Levasseur, répond aux appels des ogres Weinstein et s'attaque au film étrangement culte de Joe Dante, développant ainsi sa vision toute personnelle d'une Amérique schizophrène, qu'il avait abordé par le biais de sa "Colline à des yeux" bien méchante.
Si le scénario faisandé de "Piranha 3D" est bien entendu un prétexte pour enchainer les morceaux de bravoure en tous genres, il n'en réunit pas moins toutes les figures controversées du pays de l'Oncle Sam, à savoir une représentation mercantile et déformée du sexe, un fanatisme religieux à côté de la plaque, un héroïsme exacerbé, le tout au service d'une morale bien douteuse, où seuls les abstinents survivront, où le sexe est synonyme de mort violente.
D'un ennui mortel quand il devient sérieux, peinant à nous faire éprouver la moindre empathie pour ses personnages (quelle idée de nous coller deux ados fadasses et des moutards en guise de héros !), "Piranha 3D" atteint heureusement des sommets dans le fun lorsqu'il accepte enfin sa nature de produit décérébré et déviant, quand il lâche enfin les chiens à l'heure de la soupe, transformant la masse populaire en un véritable burger humain sous les yeux sadiques de ses deux frenchies de réalisateurs.
D'une générosité qui confine au sublime, d'un gore à la limite de la gerboulade, la relecture d'Aja est un pur délire de sales gosses dans ses meilleurs moments, allant assez loin dans la connerie (le zob gobé puis recraché, magnifique !), porté par des effets de plateaux grandioses dû au duo Nicotero / Berger, compensant des CGI inachevés (les producteurs eurent la bonne idée d'engager une compagnie minable avant de faire appel à une autre plus qualifiée devant l'étendue des dégâts), des cameos faciles et inutiles et surtout, un final incroyablement frustrant, coupant court à ce qui aurait du être un double climax dantesque.