Nous voici transportés dans les paysages verdoyants de Dayes, un petit village près de Saint Dizier dans la Haute-Marne. C'est là que Pierre possède une ferme dans laquelle il s'investit énormément pour ses vaches laitières. Son activité est dure, contraignante mais qu'importe, il aime ses bêtes auxquelles il porte le plus grand soin.
Tout va pour le mieux jusqu'au jour où les médias attirent son attention sur le fait qu'une épizootie bovine commence à toucher les élevages français et que dans les régions concernées le couperet tombe avec l'élimination des bêtes et la désinfections complète des lieux. Pierre devient alors soucieux pour ses bêtes et pour son avenir car le phénomène encore rare en a tendance à s'accentuer. Il apprend que pas très loin, un paysan belge, touché par ce fléau, est ruiné, son troupeau ayant été détruit.
Tout n'allait pas trop mal pour Pierre qui, comme beaucoup de petits éleveurs, arrivait à gagner sa vie parfois même difficilement malgré les efforts consentis au travail, aux soins et aux levées matinales. Ses parents vivent tout près de la ferme et sa sœur est vétérinaire, cependant le "petit paysan" n'est pas serein. Une vive inquiétude voire même une grosse panique s'empare de lui lorsqu'il apprend que cette maladie tant redoutée sur les bovins rôde aux alentours. Les insomnies, les cauchemars, l'obsession de vouloir en savoir plus en consultant son ordinateur l'amènent à changer de caractères. Les soucis l'envahissent et Pierre ne cesse de surveiller sur son bétail les symptômes de la maladie, du sang devant apparaître sur le dos des vaches. Ses bêtes envahissent ses pensées de jour comme de nuit lorsqu'un jour, en caressant l'une de ses vaches devenue à ses yeux souffrante, il constate que le sang perle. Cette peur se transforme alors en terreur. Il voit ses bêtes sacrifiées, son avenir s'écrouler comme un jeu de cartes. Toutes les solutions les plus extrêmes vont être envisagées et exécutées afin de cacher aux autorités la triste vérité. Il tente de demander à Pascale, sa sœur vétérinaire, de bafouer la loi. Il va même consulter un fermier belge en détresse pour tenter de se liguer contre cette adversité qui s'acharne. Mais rien à faire, le moment est grave pour l'élevage bovin, bref Pierre est un homme fini, impuissant contre l'injustice de la nature. Ses bêtes ont beau disparaître des listes mystérieusement, personne n'est dupe. C'est un grand virage, une vie à refaire avec tout le désespoir et les incertitudes que cela provoque.
Hubert Charuel s'était jusqu'à ce film spécialisé dans le court-métrage et là il nous offre son premier long-métrage qui est à mon avis une belle réussite. Voici un film certes dramatique et documentaire qu'un brin d "thriller vient pimenter avec bonheur. Il est vrai que le réalisateur avait tous les éléments pour nous raconter cette histoire très réaliste puisqu'il est issu d'une famille paysanne où ce film fut tourné.
Ainsi certains souvenirs d'enfance sont restés gravés dans la tête de Hubert charel et il n'oubliera jamais les frayeurs de 1990, année où intervint "la crise de la vache folle" avec toutes les conséquences désastreuses que cela supposait.
C'est ainsi qu'il en délivre sa vision : "Je me revois devant la télé, il y a un sujet sur la maladie, personne ne comprend ce qui se e, on tue tous les animaux. Et ma mère me dit : « Si ça arrive chez nous, je me suicide ». J’ai dix ans et je me dis que ça peut arriver… Je me souviens de la tension qu’il y avait partout. Comme Pierre le fait avec sa sœur, les paysans appellent souvent leur vétérinaire, ils veulent être rassurés. Et Creutzfeld-Jacob était si particulier que les vétos ne savaient pas quoi dire. On ne savait pas par où ait la contamination, c’était la panique générale. Une paranoïa totale."
Comment ne pas faire le rapprochement avec ce drame terrible que vit Pierre remarquablement interprété par Sara Giraudeau, prise en plein dilemme devant la détresse et les actes de son frère.
Il faut voir ce film qui nous relate avec beaucoup de force un fléau qui couve à tout instant à la grande crainte du monde de la paysannerie mais aussi de nous-même qui en subirons forcément les conséquences dans ce monde plein d'embûches et d'incertitudes. Hubert charuel le démontre ici très bien.
Ce film a obtenu :
- "Petit paysan" a reçu le soutien de la Fondation Gan pour le cinéma en 2015 et a été sélectionné à la Semaine de la Critique en 2017.
Box-Office : 547 025
Note: 8/10