Regarder Perfect Sense en pleine pandémie mondiale du Coronavirus donne au film une actualité étonnante. Mais même pris hors de ce contexte, le film séduit car il s'empare avec originalité du thème de l'existence humaine. Dystopie contemporaine, il met à l'honneur le sens de la vie par le prisme des cinq sens, ou plus précisément de leur disparition. Privés de l'odorat, du goût, puis de l'ouïe et de la vue, nos personnages se trouveront dans l'amour et la confiance.
Les deux personnages ne sont pas choisis au hasard : elle est épidémiologiste, donc au cœur de la science médicale et de la recherche, pourtant désemparées devant l'infection mondiale. Lui est cuisinier, un artisan du plaisir des papilles et des yeux. À eux deux, ils forment un "couple d'ordures" comme ils se surnomment : abjects, méprisants, égoïstes dans leurs relations amoureuses, mais aussi meurtris par des drames personnels.
Ponctué par des images d'actualité, autant de parenthèses narratives dans lesquelles la narratrice nous rappelle les pressions écologiques et sociales exercées sur la planète, le film mêle à la (science) fiction une réflexion critique sur les limites du système de consommation et de production actuel.
La puissance de proposition de ce film est innovante et convaincante, elle en est presque malicieusement dérangeante quand on imagine que la science fiction pourrait friser avec la réalité.