Si ce titre inquiétant renvoie bel et bien à la longue séquence finale du film, le choix du terme "panique" pourrait néanmoins paraître étrange, voire en décalage avec le contenu de ce premier long-métrage de Julien Duvivier depuis la Libération. Sauf à y voir une référence à "Fury" de Fritz Lang, sorti dix ans plus tôt, avec lequel "Panique" partage une thématique similaire, celle de l'homme innocent accusé à tort par la foule déchaînée.
Car "Panique" n'est pas un polar, contrairement à certaines apparences : il s'agit d'un drame, et si le film commence par la découverte d'un cadavre, on connaît rapidement l'identité du meurtrier.
Le récit est centré sur trois personnages, à commencer par Monsieur Hire (Michel Simon), un homme solitaire et misanthrope, qui intrigue les "honnêtes gens" qui le côtoient dans la petite auberge où il vit reclus. On apprendra plus tard le é malheureux de cet étrange bonhomme, qui tombe immédiatement sous le charme d'Alice (Viviane Romance), une nouvelle venue dans le quartier.
Cette amoureuse ionnée est entièrement soumise à son amant Alfred (Paul Bernard), pour les beaux yeux duquel elle vient de er plusieurs mois en prison.
L'action se déroule à Paris, mais dans une atmosphère provinciale, tant les faubourgs de la capitale s'apparentaient alors à de petits villages.
Duvivier ne lâche pas d'une semelle ses trois protagonistes, signant une mise en scène précise et signifiante de leurs trajectoires respectives. Jusqu'à ce final virtuose sur les toits, au cours duquel le cinéaste français dirige habilement les mouvements de foule et maîtrise parfaitement la gestion de l'espace.
A l'origine de "Panique", on trouve un roman de Georges Simenon : "Les fiançailles de Monsieur Hire", qui aura également inspiré Patrice Leconte, auteur à un demi-siècle d'intervalle d' un remake avec Michel Blanc dans le rôle-titre.
Au moment de noter, j'étais proche d'attribuer un bon 7, mais si je monte jusqu'à 8, c'est en raison du contexte de cette histoire, dont certains aspects pourront apparaître datés au yeux du public contemporain (scénario un brin linéaire, caractérisation un peu simpliste des personnages).
Julien Duvivier faisait preuve alors d'une belle audace, très peu de temps après des heures aussi sombres de notre histoire, en présentant une foule de Français veules et assoiffés de vengeance, prêts à dénoncer pour certains, à pratiquer une vengeance aveugle pour d'autres, ce qui renvoie autant à la collaboration qu'à l'épuration encore plus récente.
Ce qui pourra d'ailleurs expliquer l'échec cuisant, à sa sortie début 1947, d'un film aussi puissant, à l'interprétation habitée et à la mise en scène irable.