"Tu ne gagneras jamais ta vie avec une guitare, John !"
Je suis entré dans ce "nowhere boy" de la manière la plus diamétralement opposée à la façon dont j'étais entré dans l'univers Proustien (objet de ma dernière critique): en terrain conquis.
A reculons, et prêt à dégainer à la première faute historique ou de goût.
Faut dire que les Beatles, c'est juste un peu un domaine qui m'intéresse. Avec ma cinquantaine (ou plus) de bouquins lus sur le seul sujet de ce groupe ou des membres qui l'ont composé, j'avais un petit background. D'où la vigilance, la crainte, la circonspection.
La moindre allusion, le moindre personnage apparaissant trois secondes à l'écran, la moindre anecdote a déjà fait l'objet de pléthore de publication, dont les plus importantes ont été lues pas mes soins, donc gaffe !
A titre d'exemple, l'allusion à la sœur que John n'a jamais connu et dont on entend ni le nom ni la destinée, j'ai lu le livre qu'elle a écrit. C'est vous dire.
Après cinq premières minutes pendant lesquelles je me sentais disposé au sarcasme, la tension est bientôt retombée pour faire place à un sentiment beaucoup plus doux: la surprise et le plaisir.
L'essentiel de ce que nous connaissons du garçon est bien là, l'esprit de ce que furent les années adolescentes de sa vie est respecté, le tout est plutôt bien agencé, une certaine émotion affleure, et le fond Beatles (la création du groupe) est à la fois sobrement mais fidèlement traité.
Le contexte familial des Lennon est présenté progressivement et permet, sur le registre du mystère, de tisser une trame plutôt prenante (enfin, j'imagine).
L'arrière plan historique (la reconstitution des 50's liverpooliennes) et social (les accents, le mode de vie) est on ne peut plus correct, et le choix des acteurs à ceci de salutaire que la réalisatrice n'a pas cherché à jouer sur le côté sosie mais plutôt sur des acteurs capables de restituer l'esprit des garçons pas encore dans le vent.
Côté anecdote, il manque peut-être juste la célèbre phrase de Tante Mimi dont je me suis servi pour le titre de cette critique. Rien de bien méchant.
Rien que pour tous ces points là, je me montre reconnaissant envers Sam Taylor-Wood.
Maintenant, j'ai bien conscience que ma ion Beatlesque peut m'avoir joué le tour inverse de ce que je redoutais, à savoir, m'avoir fait aimé ce film en dehors de ses qualités propres, pour les raisons que j'ai exposé un peu plus haut.
C'est possible.
Toujours est-il que mon témoignage vaut ce qu'il vaut, et pourra au moins éclairer un Beatle-maniaque inquiet: ça e. Plutôt bien.