Monsieur
6.4
Monsieur

Film de Jean-Paul Le Chanois (1964)

Voir le film

Monsieur Gabin

Il était une époque où on savait faire des petits films sans conséquence en s’appuyant sur une vague intrigue et des acteurs de talent. Une époque évidemment révolue. Jean-Paul Le Chanois, qui n’est assurément pas le meilleur de sa génération mais qui a toujours su se mettre intelligemment au service de Jean Gabin, lui sert ici la soupe avec une grande efficacité dans ce qui est peut-être un des plus méconnus longs-métrages de l’acteur. C’est dommage d’ailleurs car, s’il ne brille pas toujours par sa rigueur scénaristique, il a la bonne idée de sortir Gabin de ses rôles habituels de truand. En l’obligeant à jouer d’abord un riche banquier puis un majordome, il offre toute l’étendue de son talent, endossant le rôle d’un homme d’esprit comme on enfile un gant. Avec une diction plus carrée et le verbe plus arrondi, il fait merveille dans un rôle inattendu où, cependant, il écrase de sa personne tous ceux qui l’entourent. Les mots de Pascal Jardin, moins populaires que ceux de Michel Audiard, font totalement mouche dans sa bouche.


Entouré de seconds rôles savoureux (même si le rôle de Philippe Noiret aurait mérité d’être distribué à un acteur plus âgé et plus sûr de lui pour faire face à Gabin), le film déroule une intrigue qui tutoie le vaudeville sans sombrer dans la farce des claquements de portes et des marivaudages faciles. Au contraire, le récit égratigne, à la façon des comédies de moeurs, ses différents personnages et dresse le portrait d’une bourgeoisie qui peut, selon ses incarnations, se révéler détestable ou des plus humanistes. Les hommes ont plutôt le beau rôle (les cocus, ce sont eux !) mais les rôles féminins sont suffisamment soignés pour que Liselotte Pulver, Mireille Darc ou encore Gaby Morlay (dont c’était le dernier film) trouvent grâce aux yeux des spectateurs.


C’est évidemment du petit cinéma sans prétention mais tout cela est fait avec un tel amour des acteurs que cela fonctionne parfaitement. On regrettera des facilités malheureuses (le final expédié est décevant), mais c’est un film charmant et amusant qui sent bon le savoir-faire d’antan où le talent était à tellement d’étages qu’il était possible de réaliser de jolis divertissements sans forcément de grands scénarios. En somme, tout ce qu’on ne sait plus faire aujourd’hui.


7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Liste et classement des films que j'ai vus ou revus en 2024

Créée

le 29 août 2024

Critique lue 57 fois

3 j'aime

4 commentaires

PIAS

Écrit par

Critique lue 57 fois

3
4

D'autres avis sur Monsieur

Monsieur Gabin

Il était une époque où on savait faire des petits films sans conséquence en s’appuyant sur une vague intrigue et des acteurs de talent. Une époque évidemment révolue. Jean-Paul Le Chanois, qui n’est...

Par

le 29 août 2024

3 j'aime

4

Un mort très actif.

Un banquier décide de mettre fin à ses jours, ne ant pas la disparition de sa femme. Au moment de sauter dans la Seine, il va être sauvé par son ex-femme de chambre, et va décider de faire une...

Par

le 25 mai 2020

3 j'aime

Les bons valets font les bons patrons

Voici sans aucun doute l'un des films les plus méconnus de Gabin, une sympathique comédie de moeurs qui adopte un ton boulevardier du plus bel effet, je dirais même que certaines situations sont...

Par

le 27 avr. 2018

3 j'aime

3

Du même critique

La philosophie sur le comptoir

Aïe, aïe, aïe... L'arrivée de Fabrice Caro en lieu et place de Jean-Yves Ferri qui venait, à mon sens, de signer son meilleur Astérix dans le texte, était pourtant annoncée comme une bonne nouvelle...

Par

le 15 nov. 2023

24 j'aime

22

Bottes de cuir sans chapeau melon

Le sujet de la proie aveugle n’est pas entièrement nouveau puisqu’il a déjà été traité dans, notamment, Seule dans la nuit quelques années plus tôt. Le parti-pris de ce film écrit par Brian Clemens...

Par

le 18 nov. 2022

24 j'aime

4

Le retour de la griffe Goscinny-Uderzo

Depuis la reprise de la série par Ferry et Conrad, nos amis gaulois avaient une sacrée gueule de bois. La disparition de René Goscinny avait déjà très sérieusement entamé la qualité des albums même...

Par

le 22 oct. 2021

24 j'aime

23