Mon père
6.9
Mon père

Documentaire de Max Lowe (2021)

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Mon père, ce héros

Torn (que l’on peut traduire par « déchiré »), ou plus sobrement intitulé Mon Père en français, est un magnifique documentaire réalisé en 2021 par Max Lowe, fils de la légende de l’alpinisme Alex Lowe. Le film traite autant de l’alpinisme – quelques images d’ascensions à couper le souffle, notamment dans l'Himalaya – que des relations familiales bousculées par la mort du héros. La réalisation de Mon Père s’inscrit pleinement dans le difficile processus de deuil de Max Lowe et de sa famille.

Les récits de miraculeuses ascensions – réalisées sur le fil – sont légion et glorifient souvent la pratique d’un sport aussi photogénique que dangereux, d’un sport qui fait rêver nos jeunes têtes de citadins (pour ne citer qu'eux : Méru, Au-delà des cimes, ou plus récemment le Kaizen d’Inoxtag). Le documentaire de Max prend le contrepied de ces schémas classiques en recentrant l’angle du récit sur les familles restées au bercail et confrontées à l’attente du retour du sportif.

Alex Lowe est l’une des grandes légendes de la haute montagne : homme de plein air, il a inspiré des générations d’alpinistes. Dès la fin des années 1980 et durant toute la décennie 1990, il intègre l’équipe d’escalade The North Face et participe à bon nombre d’expéditions spectaculaires, en Alaska, en Antarctique – avec par exemple la première ascension du pic Rakekniven – et dans l’Himalaya notamment. Le magasine Outside lui a d’ailleurs décerné de manière posthume le titre de « Meilleur grimpeur du monde ». Il est bien souvent accompagné dans ses aventures par Conrad Anker, son grand ami et autre légende de l’escalade et de l’alpinisme (il a réalisé trois fois l’ascension de l’Everest et a notamment découvert en face Nord de la plus haute montagne du monde le corps de George Mallory, le fameux grimpeur britannique qui pourrait être le premier à avoir atteint le mythique sommet).

Pourtant, suite à la naissance de ses trois fils Max, Sam et Isaac, Alex est de plus en plus tiraillé entre son besoin inconditionnel de montagne et son envie de er plus de temps auprès de sa famille. En route pour sa dernière expédition, il aurait d’ailleurs avoué à son ami avoir le sentiment de « l’expédition de trop ». Il aurait fait part à Conrad de son intention d’emmener dès son retour la famille au complet au parc Disneyland.

Avec cette expédition en 1999, Alex et Conrad ont pour objectif de faire la première descente à ski du Shishapangma, un sommet du Tibet. Ils sont accompagnés par l’ancien parapentiste David Bridges. Aux alentours de 5800m d’altitude, une avalanche se déclenche. Alex et David partent d’un côté, Conrad fuit de l’autre. Les deux premiers sont emportés par la neige, tandis que Conrad survit miraculeusement (mais bien amoché) à la catastrophe. Max, l’ainé des enfants, a alors 10 ans. Les recherches des corps d’Alex Lowe et David Bridges resteront infructueuses, jusqu’à leur découverte par un alpiniste allemand en 2016, 17 ans après le drame. C’est cette découverte des corps qui est l’élément déclencheur pour Max et suscite en lui l'envie de réaliser un documentaire sur son père.

Bien sûr, le film revient sur le é d’Alex Lowe et ce fameux accident mortel. Mais il brosse surtout le portrait d’une famille brisée. Conrad Anker, atteint du syndrome du survivant, va er les semaines qui suivent son retour en Amérique auprès de la veuve et de ses enfants. Rapidement (à peine 6 mois !), une relation intime et amoureuse se noue avec la mère ; et assez vite Conrad épouse Jennifer, veuve de son pote.

Les enfants réagissent différemment à cette nouvelle liaison entre Conrad et leur mère. Si tous les trois finissent par appeler leur père « Alex », les deux plus jeunes, Sam et Isaac (7 et 4 ans au moment du drame), appellent Conrad « papa », et optent pour un nom de famille composé Lowe-Anker. Max, qui en tant qu’ainé est celui qui a le plus de souvenirs de son père, est celui qui a le plus de mal à accepter la famille recomposée avec Conrad.

Les années ent, jusqu’à cet appel de 2016 qui ravive les blessures : les deux corps ont été retrouvées sur le Shishapangma. Toute la famille décide alors d’un ultime voyage au Tibet pour rapatrier le corps d’Alex.

A la fois reportage de sport et film intimiste, Mon Père est un poignant hommage d'un fils envers son héros de père, et marque les esprits en rappelle que l’alpinisme et la haute montagne sont une affaire d’entraînement, d’expérience… et de chance.

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le 23 avr. 2025

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D. Styx

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