Mars trop express

Ça me fait du mal de ne mettre que 6 à un film aussi beau techniquement qu'artistiquement. D'autant plus que c'est un film animé de science-fiction français. C'est assez rare pour le souligner.

Ne vous y méprenez pas, le film n'est pas "raté". En 1h30 les personnages restent très travaillés, l'ambiance est géniale on est vraiment transporté (la route dans la montagne j'ai adoré), la voix de Léa Drucker incarne à merveille l'héroïne (ou co-héroïne avec Carlos), les graphismes et l'animation sont époustouflants, vraiment. Bref, beaucoup de bons ingrédients.

Malheureusement, je trouve que le réalisateur a voulu en faire trop en peu de temps. Il a voulu faire des personnages travaillés, un scénario un minimum et complexe et une description détaillée de l'univers. En 1h30 c'était trop complexe. Je dirais qu'il a réussi le premier point mais qu'il aurait dû choisir de se concentrer + sur un des deux derniers. Je trouve que ça pêche notamment dans le scénario. On doit emmagasiner beaucoup d'informations en peu de temps. Le personnage censé incarner le méchant est à peine décrit, le plot twist mal amené et la dernière partie du film est incompréhensible. Je ne suis pas contre le fait de laisser une fin trouble, mais là on nous laisse tout interpréter : destination des robots, vrai méchant, objectif final de la manigance... Ce n'est pas une fin à interprétation, il manque un bout de l'histoire, on ne connait même pas la volonté de ce hacking et on ne sait pas qui en est réellement à l'origine, ça fait beaucoup. En ce qui concerne l'univers on l'identifie relativement bien mais on ne peut pas tout saisir si rapidement : à quel point les robots ont-ils une conscience ? Sont-ils considérés comme les esclaves des humains ? Quid des sauvegardé-es (qu'on découvre tard) ? Je trouve que 45 minutes de plus pour étayer tour ça n'auraient pas été de trop.

Il en reste que j'ai é un très bon et que ne serait-ce que pour l'animation et le graphisme je conseille ! Je vois aussi à la fin une sorte de morale technocritique : la technique n'est pas neutre, elle est autonome, elle renferme sa propre finalité et nous la voyons comme nécessaire, comme si une force évolutionniste nous poussait à la développer, est-ce toujours la bonne décision ? Ne devrions-nous pas en discuter collectivement ? Mettre en place un contrôle politique/démocratique sur la technique ? Ellul, Illich ou Charbonneau tentent de répondre à ces questions.