Ah oui, on imagine très bien comment Hitchcock aurait "utilisé" la blondeur de Virginie Efira, en femme fatale et névrosée, se baladant inconsciente, au bord du précipice. Que cela soit clair, Antoine Barraud n'appartient pas à la même classe que le réalisateur de Vertigo, loin s'en faut, et sa mise en scène manque cruellement d'intensité et de fluidité dans Madeleine Collins. Tant pis, le film est tout de même un habile thriller psychologique, parfois effrayant par ce qu'il suggère (une histoire à la Jean-Claude Romand ?) alors qu'il emprunte finalement une toute autre route, assez peu balisée et qui ne serait pas crédible un seul instant sans le pouvoir d'incarnation de son interprète principale. L'introduction du long-métrage est forte et mystérieuse et reste longtemps une énigme avant la révélation presque finale : un bon point pour le scénario habité par l'idée des doubles : identité, nationalité, vie ... Au jeu du double Je, le puzzle va se reconstituer et surprendre, loin d'une banale affaire d'adultère, en insistant sur la personnalité indiscernable de son héroïne. Il sera toujours possible d'ergoter sur la vraisemblance des situations mais cela vient bien moins à l'esprit que le ravissement un brin pervers de voir à quel point Virginie Efira s'approprie ce rôle ambigu, sans un instant chercher l'empathie. Barraud la filme de façon énamourée, comme Kim Novak vous savez par qui ou encore Marlene par von Sternberg (n'ayons pas peur des comparaisons) en semblant s'étonner lui-même de la capacité de l'actrice à sublimer son personnage. Cette année, elle a été, entre autres, Benedetta et Madeleine, quelle performance ! Qui d'autre, Isabelle Huppert mise à part, pourrait aller aussi loin dans l'art de la composition ?

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le 26 déc. 2021

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