L’alléchante bande-annonce promettait une jolie histoire, portée par un duo d’acteurs impliqués, habilement mise en scène et abordant des sujets profonds d’une manière touchante (le handicap, la famille, la relation mère-fils, l’art pour s’élever et s’épanouir).
Le film que l’on découvre à l’écran répond bien à ce cahier des charges. L’histoire, vraie, de Roland Perez, avocat né avec un pied-bot dans une famille nombreuse immigrée arrivée en dans les années soixante, vaut à elle seule la découverte du film en salle (et probablement la lecture du roman autobiographique dont il est tiré). Le Paris de l’époque est bien retranscrit (la ville comme la situation sociale de la famille), les acteurs sont impliqués et donnent le meilleur d’eux-mêmes, le budget se voit à l’écran (notamment les prothèses et le maquillage de Leïla Bekhti dans le rôle de la mère), la réalisation est soignée, etc… En bref, un film de bonne facture, qui a probablement ses chances pour glaner quelques nominations aux prochains Césars.
Mais c’est un peu là où le bâs blesse. A force d’être trop appliqué, le film en devient légèrement figé, les coutures apparaissent, l’émotion bien présente affleure mais n’emporte jamais ou très peu le spectateur. Malgré leurs bonnes performances, on voit Leïla Bekhti qui joue la mère et Jonathan Cohen le fils, et non leurs personnages (hormis les seconds rôles interprétés par Jeanne Balibar et Anne Le Ny, impeccables comme souvent dans la sobriété efficace). Certains thèmes qui auraient pu constituer le cœur du film sont juste effleurés : comment s’affranchir de sa mère tout en l’aimant, la relation père-fils, trouver sa place dans une grande fratrie avec un handicap (les frères et sœurs disparaissent mystérieusement de la seconde partie du film, qui se concentre sur Roland Perez adulte).
En restant dans le contrôle notamment avec ses acteurs, en cadrant beaucoup avec une voix-off un peu trop explicative, en refusant de lâcher les rênes et d’aller en profondeur dans les enjeux émotionnels de l’histoire, le film manque de souffle et se prive d’être un grand moment de cinéma.
Reste un assez bon film, réalisé et interprété avec sincérité, qui vaut le coup d’œil. C’est déjà pas si mal !