Une fois n’est pas coutume, mon avis sur ce film apparaîtra sans aucun doute partial. Certes, on peut saluer la tentative de vulgarisation d’une œuvre méconnue de Jane Austen, auteure phare de l’époque victorienne. On peut s’incliner respectueusement sur la gamme de costumes présentée et sur le choix de décors retenus. Ils illustrent intelligemment l’époque. Jusque là, il y a matière non pas à s’extasier, mais à trouver un certain contentement.
Pour autant, la mécanique du film ne fonctionne pas. La forme y est pour beaucoup. Déjà l’idée de départ avec cette présentation des protagonistes. Elle se veut pédagogique (au cas où un neuneu perdrait le fil des personnages en cours de route), c’est totalement raté, voire agaçant.
Le scénario tiré du roman « Lady Susan » respecte la lettre (« Lady Susan » est conçu comme un recueil de correspondance). Quasiment aucune aération n’est prévue entre les dialogues, qui s’ils séduisent au début, finissent par étourdir. Point trop n’en faut !
La plupart des acteurs s’en sortent tant bien que mal (belle composition de Chloë Sevigny), mais il en est une qui rame et donne parfois l’impression de débiter son texte sans vraiment le comprendre tout à fait. En effet, Kate Beckinsale, malgré son joli minois, n’est pas à la hauteur du rôle. « Lady Susan » (je n’ai pas lu le roman) semble être une héroïne vénéneuse, désargentée, machiavélique, calculatrice et redoutablement intelligente. Des qualités nécessaires pour se faire une place dans ce milieu si fermé. Si l’on pressent bien ces traits de caractère dans les dialogues, à l’écran cela ne transparaît jamais. Cette Lady Susan là semble tout droit sortie des bas-fonds de Whitechapel. C’est pour le moins gênant.
Quant à la mise en scène de Stillman, d’une rare suffisance, elle se contente des bons mots, et de quelques cabrioles. En rien transcendante, elle provoque l’ennui.
Je n’ai donc pris aucun plaisir à suivre ce « Love & friendship », par contre cela m’a donné très envie de lire le roman. Peut-être réussirai-je alors à mieux m’y projeter. Adapter un classique n’est jamais chose aisée. Et dans ce sens je partage l’opinion de Jane Austen, « Je déclare qu’après tout, il n’y a pas de plaisir qui vaille la lecture ».