Il n'est pas si fréquent de pouvoir souligner l'audace d'un cinéaste. On entend par audace, non pas la provocation bling-bling et vide destinée à choquer le bourgeois, mais la démarche construite et structurée d'un auteur qui sait où il va.
Particulièrement intéressé par la culture Queer, Antony Hickling y inscrit son film tout en le nourrissant d'apports personnels, enfance religieuse, expériences déstabilisantes, questionnements identitaires.
Construit sous la forme d'un triptyque évoquant la Sainte Trinité, Little gay boy narre la destin singulier de JC, fils de Maria, prostituée volumineuse aux désirs incestueux et de Dieu lui-même, homosexuel rigolard adepte de blagues nulles.
JC a le regard d'un ange. Subissant violences et humiliations, il semble habité de fantasmes sado-masochistes, sans que l'on sache s'il provoque ou subit les situations dans lesquelles il se trouve rabaissé.
Riche et multiple, évoquant tout autant le cinéma de Pasolini que celui de Fassbinder, John Waters ou Derek Jarman (dont Antony Hickling revendique l'influence), l'univers pictural de Pierre et Gilles ou David LaChapelle, Little gay boy mêle danse, performances SM, mauvais goût, icônographie chrétienne, charges anticléricales et récit initiatique dans un grand brassage cathartique plutôt jubilatoire.
Gaëtan Vettier incarne avec justesse ce jeune candide aux désirs mystérieux. Tout comme Amanda Dawson, il assume nudité et scènes délicates avec une détermination qui force le respect. À leurs côtés, Manuel Blanc est tout simplement épatant.
Œuvre engagée tournée avec rien mais aux partis pris radicaux, Little gay boy est un vrai plaisir de cinéma, foisonnant, troublant, irrespectueux et profondément tendre.