I California!

Les caractères dysfonctionnels sont la grande spécialité de Paul Thomas Anderson. Et Licorice Pizza n'est pas l'exception à la règle. Tout le monde y a une case en moins. Reste que cela n'est pas forcément synonyme de "gravité" et de "traumatisme". Au contraire, "légèreté" et "euphorie" sont des possibilités de remplacement tout aussi à leur place et tout aussi efficaces.


Le début des années 1970 (que le réalisateur avait déjà su reconstituer avec maestria dans Boogie Nights !) par son esthétisme outrancier et la Californie par sa chaleur lumineuse contribuent à insuffler visuellement cette atmosphère.


Le sujet apporte sa pierre à l'édifice puisque c'est une succession, autour de la thématique du age de l'adolescence à l'âge adulte, de moments heureux, par leur portée sentimentale et/ou par leur côté insolite profond, que la mémoire retient et qui est un des plus fertiles terreaux pour les souvenirs. Bien sûr, il y a la tristesse qui en est un autre, mais le parti-pris du film, c'est de regarder du côté des émotions positives.


Le cadre est aussi essentiel ici. Le surnommé Golden State, c'est là où vivent les plus grandes stars ou personnalités de la planète (sans parler que le personnage principal évolue dans le show-biz !). Qui dit "célébrités" dit "gros tarés" en perspective, donc vous y verrez plus de dégénérés au mètre carré qu'ailleurs.


Si les protagonistes en bons personnages d'Anderson ne se départent d'une bonne dose de folie, ils apparaissent comme des parangons de normalité en comparaison. Cet écart est encore amplifié parce que face à des débutants ou des silhouettes peu connues, le cinéaste place pour jouer la crème des timbrés des visages ô combien familiers. Ainsi, on croise Sean Penn dans le rôle de Jack Holden (comprenez William Holden !), toutefois sympathique, mais un peu trop porté sur la bibine (avec la grosse prise de risque que ça comprend... oui, on est encore plus con quand on est bourré, mais lui, c'est à une proportion à la "hauteur" de son statut !), et Bradley Cooper à l'aise dans le délire de Jon Peters (comprenez... ben, Jon Peters quoi !), médaille d'or du gros teubé ne ant pas à côté d'une occasion pour montrer qu'il mérite d'être qualifié ainsi.


Autrement, si prendre Cooper Hoffman, fils du trop tôt disparu Philip Seymour, est certainement pour le metteur en scène un moyen d'exorciser la perte inestimable d'un grand fidèle (et sûrement plus bien au-delà de l'artistique !), c'est surtout la musicienne Alana Haim (je ne connais pas le groupe qu'elle forme avec ses sœurs, en conséquence, je n'en dirai rien !), avec son physique atypique donnant lieu à une photogénie étonnante, qui fait des étincelles par son grand talent et un charisme incontestable. C'est la grande révélation de l'ensemble.


En résumé et pour conclure, même dans un genre a-priori aussi usé que le teen movie, Paul Thomas Anderson réussit à imposer son originalité. Pour peu que vous acceptez le style du Monsieur, vous ne regretterez pas les deux heures et treize minutes agréables ées à visionner le tout.

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le 6 janv. 2022

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Plume231

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