" Comme c'est parti là on a toutes les raisons pour se détester "
Les sentiments ça ne se partage que difficilement, dans la joie parfois, dans la douleur souvent, de ces histoires d'amour ionnées qui ne peuvent que finir "mal en général". Ici, point de grandes envolées sentimentales, juste deux acteurs formidables qui donnent beaucoup à leurs personnages, les larmes de Bacri sont inoubliables, la grande fraîcheur ainsi que douce folie d'Isabelle Carré ne s'oublie pas non plus.Cette fraîcheur naissante des sentiments donne au film une image, celle-ci: la course folle dans l'herbe avant de s'y jeter pour s'apaiser un moment près de l'être aimé.
A l'aube de ces sentiments que Lvovsky explore ici, une chorale lyrique vient les chanter, les faire s'épanouir par la voix, tout prend un air d'Opéra, des costumes aux décors, tous imprégnés de cette couleur vive qui donne d'autant plus de vie aux personnages, au film, à l'ensemble. Le ton se rapproche tantot de la comédie, tantot du drame romantique quand on voit qu'en une petite scénette les "enfants ultra tops " de Jacques résume sa vie où il est montré comme il se voit "moche, gros, con ..." mais aussi avec tendresse, comme nous le voyions, lui qui se fond en excuse quand de sa femme il dit un mot de travers devant cette maîtresse inapprivoisable qui se demande si elle peut aimer deux hommes à la fois.
Allant plus loin que la seule force de deux opposés qui s'attirent, Lvovsky montre comment d'une situation simple, les sentiments peuvent grandir et nous envahir, le nouveau Jacques apparaît alors, heureux, joyeux, démonstratif. Sa femme se révèle moins névrosée qu'il n'y parait enfermée dans une bourgeoisie qui l'encombre, un ennui quasiment mortel.François se révèle froid et dur face au torrent de larmes que devient sa femme qui rêvait pourtant d'un mariage magnifique (superbe séquence à l'église). C'est l'éclatement qui naît autour de la tragédienne qu'est Edith, entière jusqu’au bout, aimée pour toujours, car, même partie, même après la rupture jamais tout à fait digérée, les sentiments ne s'envolent pas, ils nous font vivre, éclater, vibrer et parfois très mal, on les hurle alors à la face du monde, pleins de rêves, de fantasmes, ou bien on les fait éclater dans un sanglot qu'un souvenir heureux à jamais disparu nous arrache, en nous percutant à cette force qui nous submerge et dont on ne peut se débarrasser: les sentiments tout simplement, quelle que soit leur nature. Lvosky réussie un film à son image: coloré, simple, atypique où se mêlent la tendresse, le rire et les larmes dans une force éclatante de vitalité où les êtres sont d'une beauté fracassante même (et surtout) dans leur maladresse ...
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Vus/Revus en 2013