Un corps est découvert emmuré dans une cellule d'un monastère lorrain.Le commissaire Niemans est dépêché sur place pour enquêter et va se trouver confronté à un sacré sac de noeuds.Quatre ans après le hit de Mathieu Kassovitz,cette suite s'est joyeusement fait désosser.Ce n'est pas totalement injustifié,mais le film n'est cependant pas aussi mauvais qu'on l'a dit.On lui a beaucoup reproché de n'avoir aucun rapport avec "Les rivières pourpres",ce qui à mieux y regarder est faux.Certes,il n'y a plus de Kasso,seul le personnage de Niemans relie les deux films,ça se e dans des contextes et des régions différents,on a changé de scénariste et ce n'est pas tiré d'un roman de Jean-Christophe Grangé.Sauf que des points communs existent également.Déjà la délocalisation de l'enquête n'a rien de surprenant,le héros est un flic parisien qu'on envoie un peu partout pour résoudre des affaires compliquées,il n'a pas d'affectation fixe.Et si Luc Besson,coproducteur du film avec sa société EuropaCorp,signe scénario et dialogues,c'est au départ Grangé qui devait s'en charger.Mais l'écrivain,en panne d'inspiration,a préféré renoncer,ce qui n'a pas empêché Lucho de le consulter et de s'inspirer de son univers,qui est bien recréé ici.Outre Besson,on trouve à la production la Légende Entreprises d'Alain Goldman,ainsi que TF1 Films Production et Studiocanal,c'est dire qu'on misait gros sur cette oeuvre qui n'a pas marché.Pourtant Olivier Dahan,qui relaie Kassovitz derrière la caméra,a fait du bon boulot,réussissant à installer l'atmosphère glauque et angoissante de rigueur,surtout dans la première partie du métrage.Il a été brillamment secondé par le décorateur Olivier Raoux,qui a dégoté des endroits incroyables,et le chef-opérateur Alex Lamarque,dont la photo sombre et déprimante met bien dans l'ambiance.S'ensuit une entame très efficace qui présente des personnages mystérieux et une intrigue inquiétante et complexe exposés sur fond de vieilles pierres sinistres et délabrées faiblement éclairées par des lumières indirectes ou des bougies parfois soutenues par des éclairs fluos qui viennent en contrepoints.Il y a de la pluie,du brouillard,des forêts lugubres,et même le commissariat ressemble au sous-sol d'une caverne.Reconnaissons que l'histoire est diablement incohérente,et ça ne va faire qu'empirer au fil de scènes de plus en plus baroques.Il faut préciser à la décharge du gros Luc qu'il ne fait que reprendre la tactique de Grangé,dont les romans reposent toujours sur le même sujet:les complots d'extrême-droite.Il est le seul à les voir mais il en fout partout,ça l'obsède manifestement.Ou alors il pense juste que c'est vendeur,ce qui doit être vrai vu sa brillante carrière littéraire.Quand on mélange ça à la tendance de Besson à nous pondre des scripts extravagants qui perdent les pédales,ça donne ces péripéties nanardesques qui agitent dans un improbable shaker les Montanistes,un ordre chrétien dissident disparu depuis des siècles,sauf au pays d' EuropaCorp,un trésor du Vatican qui aurait été volé il y a des siècles aussi,une bande de cathos cinglés qui se déguisent pour reconstituer la Cène pire qu'aux J.O.,le tombeau de Lothaire II,un ancien roi des Francs,les souterrains de la Ligne Maginot,des moines Yamakasis sous amphètes et d'anciens nazis en goguette qui envahissent l'Alsace-Lorraine comme au bon vieux temps.Franchement il y a de quoi rigoler,nonobstant le fait que l'amalgame entre cathos et nazis est des plus douteux,mais il faut bien se conformer à la doxa contemporaine.Certaines scènes sont trop étirées,c'est souvent filmé dans l'obscurité,la musique tintamarresque couvre la moitié des dialogues et le final est foireux et grotesque.Sans parler des invraisemblances grossières qui pullulent,à l'image de cette étonnante confrérie de baltringues qui se travestissent en Jésus and co et dont les membres portent tous les noms des apôtres qu'ils personnifient,et en plus il pratiquent les métiers que pratiquaient les potes à JC.Comment qu'ils ont fait les mecs pour monter un barnum pareil?C'est impossible,oui,je ne vous le fais pas dire.A part ça les lieux insolites sont saisissants,d'un monastère lugubre à un lac isolé,d'une église paumée au fond des bois à des friches industrielles en ruines,d'une tourelle de tir surgissant du sol à cette bonne vieille Ligne Maginot,bien réelle car oui ces souterrains existent encore.Dahan shoote tout ça plutôt bien,même si les cabrioles des moines sont plutôt ridicules,et il ose même les énucléations comme dans l'épisode 1.La distribution est nombreuse et dans l'ensemble pas mal choisie.Jean Reno reprend le rôle de Niemans,il avait de la surface à l'époque et il fait valoir sa tranquille autorité.Benoît Magimel,qui était dans "Déjà mort",le formidable premier film de Dahan, remplace Vincent Cassel dans l'emploi du jeune flic chien fou qui l'assiste,et il fait ça très bien.Mauvaise pioche en revanche avec la nana de service,une fliquette spécialiste des religions interprétée par Camille Natta,une actrice transparente qu'on n'avait jamais vue et qu'on ne reverra pas.Le méchant est joué par l'impeccable Christopher Lee,dont la seule présence valide l'identité du film,entre néo thriller et horreur gothique.Beaucoup de seconds couteaux dans cette histoire,dont la plupart ne font qu'un bref age.Johnny Hallyday est curieusement méconnaissable,les gars ont Johnny et s'arrangent pour le filmer dans le noir avec la moitié du visage recouvert,allez comprendre.Serge Riaboukine et André Penvern sont excellents en prêtres pas nets du tout,tout comme de tout jeunots Francis Renaud,David Saracino,Michaël Abiteboul,Eriq Ebouaney et Ludovic Schoendoerffer en flics subordonnés.Le Christ en personne a les traits d'Augustin Legrand,cet acteur qui s'était fait connaître avec son combat pour les SDF mais qui n'a pas trop brillé devant les caméras,et un de ses apôtres est l'enrobé Olivier Brocheriou,révélé par "Quatre garçons pleins d'avenir".Cyril Raffaelli,un habitué d'EuropaCorp qui a tourné en vedette les "Banlieue 13",fait la démonstration de ses qualités physiques en moine bondissant.Gabrielle Lazure est bien en veuve d'apôtre,Victor Garrivier tient un de ses derniers rôles au bout d'une longue carrière qui l'a notamment vu être le mari brutal et cocu d'Isabelle Huppert dans "Coup de torchon".Ici,il est le gardien de la Ligne Maginot.On voit apparaître brièvement Jean-François Gallotte en directeur de supermarché et Frédéric Maranber,celui qui chantait "On va s'aimer" avec Mathilde Seigner dans "Mariages!",en chef de chantier.Enfin Jo Prestia et Mylène Jampanoï nous offrent une séquence savoureuse,lui en trafiquant de drogue chevelu et agressif,elle qui est sa gonzesse camée et nympho,quand Magimel s'introduit chez eux.Au début Mylène est seule et chauffe bien le flic,puis Jo se pointe et c'est la grosse baston entre les deux mecs,pas très réaliste quand on sait que Prestia est un ancien champion de kickboxing et de boxe thaïe,dans la vraie vie le pauvre Benoît finissait à l'hosto.Notes et critiques de films d'Olivier Dahan publiées précédemment:"Les seigneurs"-5,"La môme"-6.Moyenne:5.