Après la saga Les Bronzés et son incommensurable succès commercial, Philippe Harel pensait avoir eu l'idée du siècle en réalisant un film "comique" dans le même ordre d'idées avec Les Randonneurs. Envoyer un petit groupe de cinq personnes aux caractères tous plus différents les uns que les autres sur le plus difficile des sentiers de randonnée de avait, en effet, un réel potentiel humoristique et laissait présager un rendu, sinon original, du moins divertissant. Si on ajoute à cela, le décor somptueux de la Corse et le talent naissant du casting, le réalisateur disposait entre ses mains d'un diamant brut qu'il lui suffisait simplement de polir pour créer une comédie remarquable.
Or, étrangement, Philippe Harel fit un choix que d'aucuns pourraient considérer comme singulier. Plutôt que de se lancer dans une aventure où régnerait le burlesque et la cocasserie, le réalisateur semble tout au long du film nager entre deux eaux, sans parvenir à se décider si son film serait une comédie ou, au contraire, une fable de vie dépeignant les travers des comportements humains.
En effet, Les Randonneurs, vendu au préalable au grand public comme un vaudeville, ne touche jamais le spectateur par le rire. Les blagues sont inexistantes ou, en tout cas, tellement dénuées de caractère comique que cela en deviendrait presque risible. A ce sujet, il suffit de se référer à l'un des acteurs principaux du film, Benoît Poelvoorde, qui a lui-même été déboussolé durant le tournage du film en ce qu'il avait de profonds désaccords avec le réalisateur notamment sur la comicité de l'ensemble. Si l'un des protagonistes principaux du show est désarçonné, comment n'en serait-il pas de même concernant le spectateur ?
Concernant l'aspect dramatique, Philippe Harel souhaitait visiblement tenter de réaliser une étude de mœurs en mettant en lumière les défauts de ses personnages en vue de créer une sorte de Comédie Humaine. Toutefois, n'est pas Balzac qui veut. Pour traiter de la complexité des relations humaines, il faut savoir ne pas faire preuve de manichéisme. Ainsi, dénoncer les contradictions de chacun serait intéressant si les cinq protagonistes des Randonneurs n'étaient pas, à ce point, caricaturaux. Sur ce point, il apparaît d'ailleurs regrettable pour le réalisateur de ne pas avoir su exploiter le talent de certains de ses acteurs au premier rang desquels figure évidemment Poelvoorde, lequel saura briller dans des comédies dramatiques comme l'excellent Le vélo de Ghislain Lambert.
Partant, le film de Philippe Harel laissera au spectateur un goût particulièrement amer de regrets avec un synopsis de base particulièrement intéressant qui ne parviendra, néanmoins, pas à se concrétiser pour se hisser à des sommets et créer une oeuvre phare pour le spectateur.
D'ailleurs, les chiffres prouvent cette affirmation. Si le public avait laissé une chance aux Randonneurs en allant voir ce film en masse, ils ne feront pas la même erreur pour le second opus des Randonneurs à Saint-Tropez qui sera déserté en salle.